Parasha – 90 A’haré Moth – Kedochim 5783

בס”ד

Les deux Parachiot que nous lisons ensemble ce Chabat sont au cœur du Séfer Vayikra, dédié essentiellement aux conditions de la Présence de Hachem au sein de Son Peuple.

Cette Présence s’exprime particulièrement dans Sa manifestation dans le Michkan (Tabernacle) ou ensuite dans le Beth HaMikdach (Temple) à Yerouchalaïm, et plus généralement dans l’ensemble de l’existence collective et individuelle des Bené Israël dans le quotidien.

La Présence de Hachem ne consiste pas en un culte dans un Temple et des synagogues richement décorés, comme le croient ceux qui comparent la Torah à une religion !

Non, la Torah n’est pas une religion !

La Torah est l’expression profonde du plan Divin dans la Création.

La Chekhina (la Présence de Hachem) est étroitement liée à la Kedoucha (traduite de façon imprécise par “Sainteté” …). La Kedoucha consiste à faire en sorte que l’Omniprésence de Hachem soit perceptible en permanence dans le Monde. Cela se réalise à travers l’existence de chacun à chaque instant. Chaque “miette” de notre existence doit être dédiée à notre mission “d’ambassadeurs” de Hachem dans le Monde.

A l’opposé de cette Avoda (le Service de Hachem) se situe la Avoda Zara (littéralement : un “service étranger”).

La Avoda Zara (l’idolâtrie) est la promotion de concepts occultant la perception du Créateur Qui dirige effectivement le Monde qu’Il a créé dans chaque détail. Toute idéologie consistant à reconnaître une autonomie quelle qu’elle soit à une “force” quelconque dans le Monde est en rupture avec la réalité !

Dans le début de la Paracha Kedochim, qui nous dicte une vie entière de Kedoucha, figure le verset : “Al tifnou el haélilim…” (Vayikra, 19, 4).  “Ne vous tournez pas vers les fausses divinités, et ne vous faites pas des divinités en métal fondu ; Je suis Hachem votre Dieu !”.

La Guemara (Chabat 149a) rapporte que le verset : “ne vous tournez pas vers les fausses divinités” nous enseigne qu’il nous est interdit de contempler une figurine. Et elle explique : “Ne vous tournez pas vers votre fantaisie !”. Cette injonction est rapportée dans le Séfer Ha’Hinoukh (paragraphe 213) qui cite le Midrach (Sifra Kedochim 6) qui explique que cette contemplation mène à adhérer à la Avoda Zara.

Le Rambam développe cette interdiction et l’applique à toute pensée qui entraîne l’homme à remettre en cause un des principes fondamentaux de la Emouna (Michné Torah, Hilkhot Avoda Zara, 2, 2-3).

Si on s’autorise de telles spéculations, le chemin n’est pas loin à la négation de la Emouna, tant l’intellect humain est fragile.

Ces propos peuvent surprendre, à une époque où le monde ambiant a cédé aux idéaux de “liberté de pensée”, et encore plus, de “liberté” totale, même de comportement … Nous sommes trop éloignés des premières générations de “philosophes” qui ont pollué l’ensemble de l’humanité il y a plus de deux siècles, pour réaliser que les motivations “élevées” dans leur spéculation se situaient au niveau de la satisfaction des pulsions les plus basses. Les mouvements sociaux qui ont agité le monde il y a plus de soixante ans, à partir de l’agitation étudiante, qui s’est caractérisée par la dissolution des mœurs, en sont une manifestation flagrante.

En quoi consiste alors le problème initial, et comment nous pouvons vivre en harmonie intérieure tout en étant apparemment bridés dans nos pensées ?!

Tout d’abord quel est le sens du terme “tifnou” que nous avons traduit par : “se tourner” ? 

Rav Chimchon Raphaël Hirsch et le Malbim relient ce verbe à la racine “panéh” qui signifie : “dégager”. Il s’agit d’une interdiction de “dégager” de la “place” dans notre esprit pour des spéculations diverses.

Rav Hirsch explique qu’il s’agit ici de “libérer” de l’espace dans la pensée qui est naturellement pleine de la Présence de Hachem. Il nous est ainsi interdit de nous détourner si peu que ce soit de la pensée sur Hachem pour de telles considérations.

Pour le terme “élilim” qui désigne les “fausses divinités”, Rachi le relie à la racine “al” qui veut dire “non”. Il est comme “rien”.

Rabbi Yerou’ham Levovitz (Daat Torah, 19,4) explique que ce terme définit ainsi ces fausses divinités comme des “aberrations” intellectuelles. Tout comme il ne viendrait pas à l’esprit de s’interroger sur la réalité d’un “récipient” en feu pour contenir de l’eau, et une telle pensée n’effleure même pas l’esprit un instant, de même, les considérations sur les “élilim” n’ont pas place dans notre esprit même un instant.

Même si nous croyons renforcer notre Emouna par cette interrogation, le fait de s’interroger si peu que ce soit au sujet d’une des questions touchant à la Avoda Zara ou ses équivalents manifeste au moins un doute infime,

Rabbi Yerou’ham ajoute que le verset montre que la conséquence inévitable d’une telle pensée est le passage à l’adhésion à cette idée. Il développe que l’intérêt manifesté par l’homme est la source de l’existence ultérieure de la “chose”. C’est par l’investissement de l’homme qu’une chose qui n’a pas de valeur intrinsèque acquiert de la “réalité”.

Ainsi en est-il des honneurs ; ainsi en est-il de l’argent…

Rabbi Yerou’ham explique que dès lors que l’homme s’égare, il perd la conscience des réalités. Même Adam Harichone a dû entendre de Hachem, après que sa faute l’ait égaré du réel : “…car tu es terre, et à la terre tu retourneras” (Beréchit, 3, 19).

Au regard de ces explications, il s’avère qu’il n’est pas question de “s’aveugler” par soumission “religieuse”, comme le prétendent les adeptes de la “liberté de pensée” !

Bien au contraire, il s’agit de retrouver la raison et le bon sens naturel dont Hachem nous a gratifiés, afin de ne pas perdre pied face aux perturbations dont notre esprit pourrait être victime.

Considérons quelques exemples de théories qui ont, ou ont eu cours dans les générations récentes, et dont l’absurdité devient chaque jour plus évidente :

– La déclaration des “Droits de l’Homme”, et la liberté des individus et des peuples, pierres angulaires de toute la “civilisation” moderne, n’empêche nullement les abus innombrables tant collectifs qu’individuels.

La société voile “pudiquement” ses travers en les habillant de justifications politico-économiques, quand ce n’est pas au nom de principes moraux “supérieurs” …

-La théorie fumeuse de “l’évolution” base du refus de soumission au Créateur, a abondamment échoué à faire ses preuves. (Pour un échantillon de ses incohérences sans nombre, voir les ouvrages exceptionnels de Rav Avigdor Miller sur ce sujet, abondamment documentés en sources authentiques issues des “délires” des adeptes de cette “religion” …).

-La démocratie, émanant du principe de liberté des peuples, a bien fait la preuve de ses échecs aux quatre coins du monde, sombrant tour à tour dans des dérives totalitaires ou dans les avatars de la démagogie. Aucun peuple au monde ne peut se targuer d’un exercice “efficace” de ce type de système politique. Il est vrai que les monarchies de toutes sortes n’ont pas plus rendu les peuples réellement heureux, mais la “panacée universelle” sombre dans le fiasco …

-La science et ses applications “techniques” n’a, elle aussi, pas abouti au bonheur sur terre. Il n’est que de considérer toutes les réunions internationales cherchant à conjurer les déprédations causées à l’environnement par l’utilisation systématique des “progrès” scientifiques pour conclure que là aussi l’humanité a échoué dans sa quête du bonheur.

Cette liste n’a pas de fin ! Mais notre propos n’est pas de conclure à l’échec de la civilisation qui ne nous concerne pas.

Notre but est de comprendre la profondeur des recommandations de notre merveilleuse Torah !

Notre Paracha nous a gratifiés d’un “petit” verset tout simple qui nous indique la voie de la vraie santé mentale. En évitant de nous égarer dans toutes les spéculations intellectuelles qui n’ont qu’un temps, nous protégeons notre esprit, et “gardons la tête claire” face aux “vents et marées”.

Rav Zalman Sorotskin (Oznaïm LaTorah, 19,4) souligne que ce verset est précédé de l’appel (19,2) : “Soyez Kedochim, car Je suis Kadoch, Moi Hachem votre Dieu !”. Même à un homme au seuil de la “dérive”, auquel il faut dire “ne vous tournez pas vers les fausses divinités !”, même à lui, Hachem adresse l’appel “Kedochim tihyou !” (Soyez Kedochim). Tant que la dernière étincelle de contact avec Hachem n’est pas éteinte, Hachem lui dit “car Je suis Kadoch, Moi Hachem votre Dieu !”.

Le Monde créé par Hachem a pour objectif l’aboutissement de l’humanité entière à la reconnaissance de Hachem. La mission de notre Peuple consiste à être les “ambassadeurs” de Hachem pour rendre cette notion perceptible à tous.

Face à nos frères égarés, et face à l’ensemble de l’humanité, notre rôle est d’être la “vitrine” de cette conscience, sans conférences ou prosélytisme de quelque sorte que ce soit.

La Kedoucha que nous dicte la Paracha Kedochim, au centre du Séfer Vayikra, reflète la perfection d’une vie de “bon sens” permanent.

שבת שלום !

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Rav Eliezer RISSMAK     Yechiva OHALE YAACOV    
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