בס »ד
La Paracha Tsav complète les règles relatives aux Korbanot (offrandes) commencées dans la Paracha Vayikra. Parmi ces règles figure l’obligation de purger les récipients qui ont servi à la cuisson du Korban ‘Hatat (l’offrande de réparation) de l’imprégnation du Korban (Vayikra 6, 21) : « …et un récipient en terre cuite dans lequel elle sera cuite sera brisé ; et si elle a cuit dans un récipient en cuivre, il sera récuré et rincé à l’eau ».
Cette règle s’apparente apparemment aux versets relatifs à l’utilisation des ustensiles du butin de la guerre contre Midyan (Bamidbar 31, 22-23) qui définissent la manière de rendre utilisables les ustensiles alimentaires provenant des non-juifs, susceptibles d’être imprégnés de saveurs d’aliments interdits. De prime abord, le passage de notre Paracha semble inspiré par la même préoccupation d’éviter à une prochaine cuisson d’être contaminée par les traces du produit qui y ont cuit précédemment.
Le Korban ‘Hatat devient « Notar » (restant) dès le matin suivant son offrande, et en tant que tel, il est interdit à la consommation. Cela pourrait être la cause de la nécessité de contexte nettoyer l’ustensile des traces du Notar avant une nouvelle utilisation. Il convient d’ailleurs de remarquer que ces règles ne peuvent apparaître a priori que dans des contextes tels que celui-ci et dans le cas de butin de guerre.
En réalité, selon les règles de la Torah, seul le cas d’une erreur telle que la cuisson accidentelle d’un aliment interdit nécessite la « cachérisation » de l’ustensile (excepté le cas d’un ustensile que l’on souhaite utiliser à Pessa’h et dans lequel on aurait cuit du ‘Hamèts juste au seuil de l’interdiction du ‘Hamèts).
Pour quelle raison la Torah nous enseigne-t ’elle cette règlementation dans le contexte des Korbanot plutôt que de réserver tous les détails au passage relatif au butin de Midian ?
De plus, en ce qui concerne le récipient en terre cuite, le fait de le briser ne résout en rien le problème des saveurs imprégnées, mais viserait uniquement à empêcher toute utilisation ultérieure.
Qui plus est, du fait qu’il est interdit de sortir les restes des Korbanot de leur « domaine » approprié, et que le « Notar », (le reste du Korban après son temps d’aptitude) doit être consumé dans son enceinte, les récipients aussi doivent être traités dans l’enceinte du Beth Hamikdach, là où les Korbanot qui y ont été cuits sont offerts. Les ustensiles en cuivre sont ainsi « nettoyés » dans l’enceinte du Beth HaMikdach, et ceux en terre cuite sont brisés au même endroit.
Toutefois, même après qu’ils aient été brisés, ces ustensiles restent imprégnés des saveurs du Korban, et ne peuvent donc pas être sortis de l’enceinte du Beth HaMikdach, comme le Korban lui-même.
Que deviennent alors les nombreux récipients qui ont été brisés dans l’enceinte du Beth HaMikdach ?!
La Guemara (Zeva’him, 96a) enseigne que ces débris sont absorbés par le sol à l’endroit où ils ont été déposés. Rabénou Be’hayé (Vayikra, 6, 21) rapporte que c’est l’un des 18 Nissim (Miracles) qui se manifestaient dans le Beth Hamikdach, car sans cela, l’espace du Beth HaMikdach aurait été rempli de ces tessons.
Le Divré David (6, 21) explique que le processus dicté par la Torah a pour but l’élimination des traces du Korban, avant-même qu’il ne devienne « Notar ». Le fait de briser le récipient en terre cuite n’élimine pas, il est vrai, les traces absorbées, mais telle est la procédure que la Torah dicte dans ce cas.
Il s’avère donc que, bien que comparables aux règles de « cachérisation », ces lois relatives aux Korbanot ont un tout autre sens. Ces lois ne dépendent pas de l’intention d’utiliser les récipients pour une cuisson ultérieure. Même si ces ustensiles ne serviront plus jamais, la Mitsva est de les purger de l’imprégnation des saveurs du Korban (Voir ‘Havot Daat, 93, 2, cité dans le Ayélet Hacha’har Vayikra 6, 21).
Rachi souligne que cette règle s’applique à tous les Korbanot.
Le Sifté Cohen (Vayikra 6, 21) remarque toutefois que cette règle est exprimée particulièrement relativement au Korban ‘Hatat, parce que le ‘Hatat vient soumettre et purifier l’homme de la faute. C’est pour cette raison que la Torah suggère que l’homme doit « se briser », comme l’ustensile en terre cuite, car, comme lui, il a été créé à partir de la terre (Beréchit 2, 7).
Le Sifté Cohen ajoute que le terme « dans lequel elle sera cuite » fait allusion à la faute délibérée dont l’homme a tiré profit et dont il n’a pas de regret. Il ne peut se réparer de sa faute qu’en « se brisant ».
Si par contre, la faute n’était pas intentionnelle, elle est comparable au cuivre qui se libère de l’imprégnation suite à la cuisson du Korban par un nettoyage approprié. De même, l’homme pourra se purifier de sa faute par le jeûne qui « éteindra » le feu de la faute, puis « l’eau » de la Torah complètera la purification.
Le Keli Yakar souligne, lui aussi, le fait que la Torah a enseigné ces lois dans le passage relatif au ‘Hatat. Il explique que les traitements différents des ustensiles en terre cuite et en cuivre font allusion à différentes catégories de fauteurs. Celui qui est profondément imprégné de sa faute et a du mal à abandonner ses mauvaises habitudes ne se « réparera » qu’en brisant son cœur qui est le « récipient » dans lequel l’interdiction a « cuit ». Par contre, celui qui ne s’est imprégné que légèrement de la faute pourra se purifier par l’étude de la Torah.
Le Keli Yakar explique que les différences entre ces niveaux d’imprégnation de la faute correspondent essentiellement aux cas de celui qui se dédie à l’étude de la Torah, en opposition à celui qui la néglige.
Ainsi, au-delà de l’aspect absolu des règles de la Torah qui dépassent évidemment toutes les compréhensions humaines, nous trouvons dans les explications de nos Maîtres des indications précieuses pour notre quotidien.
Quant à l’appellation « Chabat Hagadol » (Le Grand Chabat) attribuée au Chabat précédant Pessa’h, elle est due à l’évènement qui marqua le Chabat avant la Sortie d’Egypte.
Hachem avait ordonné aux Bené Israël de prendre dès le 10 Nissan l’agneau destiné au Korban qui devait accompagner leur dernière soirée en Egypte. Les Egyptiens vénéraient l’agneau comme une divinité. Aussi, le fait d’attacher cet agneau au pied de leur lit pendant quatre jours avant le Ness (Miracle) de leur Délivrance par Hachem était une épreuve considérable pour les Bené Israël, car Il s’agissait là de braver publiquement les égyptiens en manifestant la confiance sans réserve en Hachem.
Cette année-là, le 10 Nissan tombait un Chabat, de telle sorte que cet exploit était rehaussé par le témoignage de la Création que représente chaque Chabat.
Ainsi, ce geste héroïque des Bené Israël correspond en quelque sorte au fait de briser le récipient en terre cuite du Korban. Tout comme l’homme doit, pour se purifier de la faute, se briser, les Bené Israël ont dû faire acte d’abnégation pour se nettoyer des traces d’imprégnation de leur long séjour en Egypte. Ce n’est qu’à ce prix qu’ils purent accéder à l’affranchissement complet des fausses « valeurs » de la civilisation dominante.
En nommant ce Chabat : « Chabat Hagadol », nos ‘Hakhamim nous ont souligné que nous ne pouvons nous plonger dans l’atmosphère vivifiante de Pessa’h qu’après nous être nettoyés de l’impact des diverses civilisations auxquelles nous sommes confrontés dans la Galout (Exil).
Préparons-nous à « sortir d’Egypte », et plus généralement de toutes les influences néfastes, en intégrant au plus profond de notre être les enseignements de la Paracha, et du « grand Chabat » !
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Rav Eliezer RISSMAK Yechiva OHALE YAACOV
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