Parasha – 65 ‘Hayé Sarah 5783

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La Paracha ‘Hayé Sarah décrit la dernière étape de la vie d’Avraham, depuis la mort de son épouse, Sarah Iménou (notre Mère), survenue juste après la Akédat Its’hak (Avraham est alors âgé de 137 ans), jusqu’à la mort d’Avraham Avinou à l’âge de 175 ans.

La Paracha rapporte les évènements suivants :

– La mort de Sarah ainsi que les démarches auxquelles Avraham est confronté pour l’enterrer.

– La mission qu’Avraham confie à son serviteur Eliezer d’aller chercher une épouse pour Its’hak, puis le mariage d’Its’hak et Rivka. 

– Le mariage d’Avraham avec une nouvelle épouse, Ketoura (certains commentateurs, dont Rachi l’identifient comme étant Hagar), qui lui donnera des fils.

– La mort d’Avraham et son enterrement par ses deux fils Its’hak et Yichmaël.

Considérons tout d’abord la mort de Sarah.

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La Torah introduit l’évènement par le verset : “Et la vie de Sarah fut de cent ans, et vingt ans, et sept ans, les années de la vie de Sarah”.

Nos ‘Hakhamim (Midrach Beréchit Raba, 58,1) introduisent la Paracha par le verset (Tehilim 37,18) : “Hachem “connait” les jours des hommes intègres …”.

Le Midrach explique que de même qu’ils sont intègres, ainsi leurs années sont “intègres”, c’est-à-dire “pleines”, comme le souligne le verset du début de la Paracha l

Après avoir été confronté à la mort de son épouse, le verset dit : “Et Avraham se leva de devant son mort …” (23, 3).

Rav Chalom Chapira (HaMaor ChèbaTorah, p.163) cite le Midrach (Beréchit Raba, 58,6) qui explique ce verset par le fait que le Mal’akh HaMavèt (l’Ange de la mort. “c’est le même : le Satane, le Yétser Hara, et le Mal’akh HaMavèt” (Guemara Baba Batra, 16a). Les trois rôles sont complémentaires : il incite à la faute, puis il accuse l’homme ; et enfin, il exécute la sentence Divine …) cherchait à braver Avraham.

Rav Chapira explique la nature de cet affrontement, en rapportant un autre enseignement (cité par Rachi, 23,2) selon lequel c’est l’annonce de la Akéda (la “ligature”) de Its’hak sur l’autel qui avait provoqué la mort de Sarah. Le Mal’akh HaMavèt vint l’annoncer à Sarah, sans lui dire immédiatement que Its’hak était toujours vivant.

L’émotion de l’information que son fils avait été ligoté pour être offert en sacrifice à Hachem fut trop forte, et causa sa mort.

Rav Chapira développe que nos ‘Hakhamim ont introduit le Midrach de la Paracha par le verset de Tehilim pour confirmer que ce moment était bien l’aboutissement prévu par Hachem pour la fin de la vie de Sarah.

En réalité, le Mal’akh HaMavèt n’a pas abrégé son existence. Son but était d’ébranler Avraham en lui faisant croire que son action dans la Akéda   avait causé la mort de son épouse.

Ainsi, le Mal’akh HaMavèt, dont le rôle est d’éprouver l’Homme, aurait réussi à “dévaloriser” la Mitsva par les remords qu’aurait éprouvés Avraham.

Rav Chapira explique que c’est le sens de la prière : “Et retire le “Satane” de devant nous et de derrière nous”. L’expression : “Devant nous” désigne les difficultés que le Satane accumule avant l’accomplissement de la Mitsva. “Derrière nous” vise les regrets qu’il s’applique à nous inspirer après la Mitsva, pour différentes causes, afin de dévaloriser notre Mitsva.

Une fois de plus, nous constatons la grandeur de la Emouna inébranlable d’Avraham Avinou. La Paracha précédente nous a montré à maintes reprises qu’Avraham maîtrisait totalement non seulement ses actes, mais également ses sentiments. Même une telle épreuve d’éprouver un bref instant une souffrance particulière du fait que sa Mitsva de la Akéda ait pu être la cause de la mort de son épouse, ne parvint pas à l’affaiblir dans son lien avec Hachem. Il n’éprouva pas, même, le moindre sentiment de frustration que Hachem ait “choisi” ce moment de grandeur pour lui retirer son épouse.

La suite de la Paracha est essentiellement dédiée à la mission qu’Avraham a confiée à Eliezer, son fidèle serviteur, de partir à la recherche d’une épouse appropriée pour Its’hak.

Avraham envoie Eliezer à ‘Haran, où réside sa famille, sans autre indication.

A peine arrivé à destination, Eliezer se tourne vers Hachem pour qu’Il fasse aboutir sa mission (24, 12) : “Hachem, Dieu de mon maître Avraham, fais se “trouver” devant moi aujourd’hui, et agis avec ‘Héssed envers mon maître Avraham”.

Nos ‘Hakhamim (Beréchit Raba 60, 1) commentent ce moment décisif de l’Histoire, au seuil de la découverte de Rivka Iménou, pilier de l’avenir du monde.

Le Midrach (60, 1) introduit l’analyse par le verset (Yechaya, 50, 10) : “Qui parmi vous craint Hachem, il écoute la voix de son serviteur qui a cheminé dans les ténèbres, et il n’avait pas de lueur. Qu’il ait confiance dans le Nom de Hachem, et qu’il s’appuie sur son Dieu”.

Le Midrach explique ce verset de deux manières :

-“Qui parmi vous craint Hachem” : c’est Avraham.  “Il écoute la voix de son serviteur” : que Hachem a écouté la voix de son serviteur (Hachem a entendu la prière d’Eliezer, le serviteur d’Avraham).

“Qui a cheminé dans les ténèbres” : (Il s’agit d’Avraham) qui est arrivé de Mésopotamie et sa région, et ne savait pas où il allait, comme un homme qui est dans les ténèbres.

“Sans lueur pour lui” : et qui l’éclairait ? Hachem l’éclairait à chaque endroit où il allait.

“Qu’il ait confiance dans le nom de Hachem, et qu’il s’appuie sur son Dieu” : (Ne’hèmia 9, 8) : “et Tu as trouvé son cœur fidèle devant Toi”.

Autre explication : 

“Qui parmi vous craint Hachem” : c’est Eliezer.

“Il écoute la voix de son (Son) serviteur” : la voix d’Avraham qui était le serviteur de Hachem …

“Qui a cheminé dans les ténèbres” :au moment où Eliezer est parti amener Rivka.

“Sans lueur pour lui” : et qui l’éclairait ? Hachem l’éclairait par des éclairs.

“Qu’il ait confiance dans le nom de Hachem, et qu’il s’appuie sur son Dieu” : “et il dit : Hachem, Dieu de mon maître Avraham, fais se “trouver” devant moi ce jour”.

Ce Midrach devait être rapporté dans son intégralité, afin de mettre en évidence le parallèle total qu’il établit entre Avraham et son serviteur Eliezer.

Ceci projette un éclairage indispensable sur la mission qu’Avraham confie à son serviteur.

Comment comprendre, effectivement, qu’Avraham puisse s’appuyer sur un proche, quelle que soit sa grandeur personnelle, pour mener à bien une telle entreprise, trouver la Mère du Peuple Juif, responsable de toute la continuité de l’Histoire du Monde ?!

La réponse nous vient de ce Midrach qui compare intégralement Eliezer à Avraham, dans les moindres détails de la Emouna ! Seul un être d’un tel niveau peut être investi d’une telle responsabilité !

Mais comment Eliezer a-t-il pu atteindre cette grandeur ?

Le Targoum Yonathan Ben Ouziel (Beréchit, 14,14) dit qu’Eliezer était le fils du Roi Nimrod, qui avait dirigé la construction de la Tour de Bavel, et qui avait précipité Avraham dans la fournaise,

Comment Eliezer pouvait-il être celui dont les ‘Hakhamim disent qu’il maîtrisait toutes ses pulsions comme Avraham ?!

Il est évident que c’est complètement par l’imprégnation d’Avraham, son maitre.

Nous entrevoyons ici à peine la véritable dimension d’Avraham. Sa Emouna, que nous découvrons au fil des trois Parachiot : Lekh Lekha, Vayéra et ‘Hayé Sarah, est telle qu’elle peut s’étendre avec une perfection comparable à son plus proche disciple, au point de mériter les commentaires de nos ‘Hakhamim sur sa grandeur !!

Aucun enseignement ne peut arriver à un tel résultat. Seule la Emouna profonde, sans faille, d’Avraham Avinou pouvait imprégner ainsi une personne.

A la dernière période de sa vie, Avraham a pris une nouvelle épouse (25, 1-6), (certains Commentateurs disent qu’il s’agissait de Hagar avec qui il s’est remarié) et a mis au monde des descendants “supplémentaires”, dont “l’intérêt” nous échappe quelque peu…. La Torah mentionne (verset 6) qu’Avraham eut soin de les éloigner d’Its’hak, encore de son vivant (25,6), leur présence risquant d’affecter la mission de son unique héritier dans l’alliance avec Hachem. 

Le Malbim explique que, de même qu’une plante est composée de feuilles et de fruits, ceux-ci ayant besoin de celles-là pour atteindre leur plein épanouissement, ainsi l’humanité est la somme de toutes ses multiples composantes.

D’autres explications existent, mais qui font appel à des notions profondes qui nous échappent totalement. C’est pourquoi nous ne nous étendons pas sur leur analyse …

Il reste toutefois qu’Avraham a agi ainsi soit pour accomplir la Volonté générale de Hachem que le monde soit peuplé, soit même sur ordre explicite de Hachem (selon certains Commentaires).

Une fois de plus, nous constatons, au seuil de son départ de ce monde, à l’apogée de son existence, comment Avraham ne répond à aucune motivation personnelle, jusqu’au dernier de ses actes.

Nous sortons des Parachiot consacrées à Avraham Avinou, ayant “glané” quelques enseignements destinés à orienter notre cheminement dans le lien avec Hachem. Bien que nous soyons très loin d’une telle grandeur, nous devons nous en inspirer pour “viser vers le haut”, en sachant que nos Avot (Patriarches) ont enraciné en nous l’aptitude profonde à toutes ces qualités, comme cela s’est manifesté dans la grandeur des Juifs de chaque génération face à toutes les épreuves.

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Rav Eliezer RISSMAK     Yechiva OHALE YAACOV    
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