Parasha – 60 SOUCOT 5783

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Et voici Soucot, qui vient clore les journées riches en proximité avec Hachem au mois de Tichri, à Roch Hachana et à Yom Kippour.
Soucot est le carrefour entre deux séries de moments particuliers :

  • les trois fêtes de Pèlerinage, Pessa’h Chavouot et Soucot, au cours desquelles tout le Peuple d’Israël se présentait devant Hachem au Beth HaMikdach (Temple) situé à Yerouchalaïm,
  • Les “jours redoutables” de Tichri, où chaque juif fait les “comptes” de l’année passée, et demande à Hachem de lui octroyer un nouveau “crédit”.
    Les fêtes de “Pèlerinage” sont liées à l’Histoire de la construction du Peuple de Hachem à partir de la Sortie d’Egypte et jusqu’à l’entrée en Erets Israël après le séjour de quarante ans dans le désert.
    Le mois de Tichri est lié à la Création du Monde, et, à Roch Hachana.
    Au mois de Tichri, tous les hommes (même non-juifs) sont jugés (Michna Roch Hachana, 16a).
    Nos ‘Hakhamim nous livrent un enseignement surprenant dans le Midrach (Vayikra Raba 30, 2) : Il y a un jugement devant Hachem entre les Bené Israël et les nations idolâtres.
    Le Midrach explique plus haut (21, 3) l’enjeu du conflit : Les Mal’akhim (les Anges) qui “président” à la destinée des peuples contestent la différence de sort entre les Bené Israël et les nations : puisque les Bené Israël commettent les mêmes fautes que les peuples, pourquoi ceux-ci sont condamnés, tandis que les Bené Israël sont absous ?!
    Le Midrach conclut que lorsque les Bené Israël sortent après Yom Kippour, à Soucot, avec leurs Loulavim et Etroguim en main, c’est le signe qu’ils ont eu le dessus qu’ils sont sortis victorieux dans le jugement.
    Rav Its’hak Zeev Yadler (Tiférèt Tsion, 30,2) s’étonne : en quoi le fait d’accomplir la Mitsva qui nous est imposée, de prendre le Loulav, constitue-t-il un mérite particulier ?!
    Il explique que l’objet du conflit est la responsabilité des Bené Israël dans leurs fautes : les nations accusent les Bené Israël de ne pas être “meilleurs” qu’elles. De leur côté, les Bené Israël plaident que leurs fautes sont toutes dues à l’influence de la confrontation avec les moeurs des peuples, ou même la contrainte qu’ils exercent sur eux pour les faire s’ajuster à l’environnement.
    Aussi, lorsque les Bené Israël “sortent” avec leurs Loulavim : c’est-à-dire non pas lorsqu’ils accomplissent simplement la Mitsva ponctuellement, mais qu’ils ne lâchent pas le Loulav, même après la Mitsva, par attachement à la Mitsva, ils manifestent par cela leur élan profond, et confirment que l’origine de toutes leurs fautes se situe à l’extérieur de leur personnalité propre.
    Nous pouvons ainsi comprendre un fait surprenant relatif à la Souca :
  • D’un côté, le Zohar HaKadoch (Emor, 103a) dit que seuls les Bené Israël ont leur place dans la Souca. En effet, il est interdit d’y accueillir un non-juif.
  • Par ailleurs, la Guemara (Avoda Zara, 3a) décrit un “dialogue” qui aura lieu à la fin des temps entre Hachem et les nations. Hachem invite ceux qui ont accompli la Torah à recevoir leur récompense. Les nations protestent alors qu’elles n’ont pas bénéficié de l’aide de Hachem comme ce fut le cas des Bené Israël, au moment de Matane (le don) de la Torah.
    Hachem accède alors à leur demande, et leur octroie une Mitsva unique qui leur permettra de “mériter” également une récompense.
    Hachem leur donne la Mitsva de Souca.
    Chacun s’empresse de construire une Souca sur son toit.
    Alors, Hachem “sort le soleil de son étui” (c’est l’expression employée par la Guemara) … A ce moment-là chacun sort de sa Souca en lui donnant un coup de pied !
    Les questions relatives à ce récit sont nombreuses, et il ne nous est pas possible de les aborder dans le cadre d’une étude brève.
    Une première question : pourquoi les non-juifs sont-ils punis pour avoir quitté la Souca dans des conditions où, même pour un Juif, la Mitsva s’estompe (il n’y a pas de Mitsva de demeurer dans la Souca lorsque la situation y est pénible ; Choul’han Aroukh 639,5) ?!
    A la lumière de l’explication du Tiférèt Tsion cité plus haut, nous pouvons comprendre que leur faute réside non dans le fait de quitter la Souca, mais dans le geste de dédain qui manifeste que la Mitsva-même leur pesait. Quel contraste avec les Bené Israël qui sont profondément attachés aux Mitsvot qui les relient à Hachem !!
    Toutefois, une question évidente subsiste : pourquoi la Mitsva de Souca est-elle interdite aux non-juifs actuellement, et deviendrait accessible à la fin des temps ?!
    Il est possible de répondre de diverses manières :
  • Le comportement prévisible des peuples dans l’avenir témoigne de leur nature profonde. A l’opposé des Bené Israël “pétris” de Emouna, et attachés de toute leur âme aux Mitsvot de Hachem, les non-juifs n’accomplissent ce qu’ils font comme “Mitsvot” ou bonnes actions que pour en tirer profit (voir Guemara Baba Batra, 10b). Aussi, dès à présent, leur présence dans la Souca de Emouna d’un Juif est inopportune !
  • Même dans la mesure où leur Mitsva aurait un “sens”, elle n’atteint pas, de loin, la dimension de celle d’un Juif, “pétri” de Emouna, et prêt à tous les efforts pour accomplir chaque Mitsva, même dans les conditions les plus dures (voir les divers récits sur l’accomplissement héroïque des Mitsvot pendant la Choa …) !
    Le récit de la Guemara Avoda Zara montre simultanément que les nations peuvent avoir un certain accès aux Mitsvot, mais toutefois fondamentalement différent de celui des Bené Israël.
    Chemini Atséret – Sim’hat Torah
    Avec Chemini Atsérèt qui est le dernier jour de Yom Tov, la fête de Soucot et les rendez-vous de Tichri prennent fin.
    La Torah dit (Bamidbar 29,35) : “Le huitième jour, ce sera une retenue pour vous …”. Rachi explique ces termes en rapportant un Midrach : “Parce que tous les jours de la fête, les Bené Israël ont apporté des offrandes en rapport avec les 70 nations (les taureaux Holocaustes en nombre décroissant, versets 12-34, au total 70). Et lorsqu’ils en viennent à partir (de Yerouchalaïm), Hachem leur dit (aux Bené Israël) : s’il vous plait faites-Moi un petit repas afin que J’aie satisfaction de vous !”.
    La profondeur de ce Midrach ne nous est pas accessible. Toutefois, le fait que nos ‘Hakhamim aient défini ce jour de Chemini Atsérèt comme jour de Sim’hat Torah (la Joie de la Torah) est manifestement lié à cette particularité soulignée par le Midrach.
    Alors que la fête de Soucot comporte de nombreuses Mitsvot, Chemini Atsérèt a uniquement le statut de Yom Tov, jour dédié au contact intime avec Hachem.
    Et lorsqu’aucune Mitsva spécifique ne vient solliciter un Juif, il lui reste la Mitsva permanente d’étudier la Torah. Cette Mitsva constitue le lien le plus profond et puissant d’un Juif avec Hachem.
    Or, cette Mitsva dépasse le cadre des Mitsvot actives pour lesquelles l’action matérielle a une valeur en soi. C’est pourquoi les nations pourront se voir proposer la Mitsva de Souca, ne serait-ce qu’à leur niveau de Emouna.
    En ce qui concerne l’étude de la Torah, la Guemara (Sanhédrin 59a) dit qu’un non-juif qui étudie la Torah est passible de mort par la Main de Hachem. La raison évoquée par la Guemara est que la Torah est “l’apanage” du Peuple Juif. L’étude n’est pas une simple action intellectuelle, mais un contact intime avec la Sagesse Divine. Seul celui qui vit jusqu’au plus profond de son être ce lien avec Hachem y a accès. Chaque Juif jouit de ce privilège par héritage “génétique” spirituel des Avot (Patriarches) comme nous l’avons vu dans le Dvar Torah sur la Paracha Haazinou.
    Voici donc la conclusion de ce merveilleux mois de Tichri.
    Pour conclure avec le “mot de la fin” de la Torah :
    La Paracha Vezot Haberakha, dernière Paracha de la Torah, que nous lisons le dernier jour de fête, à Chemini Atsérèt (Sim’hat Torah en dehors d’Erets Israël), se termine par les mots “leéyné col Israël” (aux yeux de tout Israël).
    Rachi explique que le mérite de Moché Rabénou exprimé par ces mots a consisté à briser les Lou’hot (les Tables des 10 Commandements) lors de la faute du Eguel. En quoi ce “haut-fait” est-il l’apogée de la grandeur de Moché Rabénou, au point de servir de conclusion à toute la Torah ?!
    Rav Mordekhaï Miller (Chiour Leyom HaChabat, p.468) relie cela au verset du Chema : “Tu aimeras Hachem ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de tout ton pouvoir”.
    Nos ‘Hakhamim expliquent “de tout ton coeur” : avec tes deux “penchants”, le penchant pour le bien, et le penchant pour le mal.
    Rabbi Miller cite la question de Rav Moché Rosenstein : comment servir Hachem avec le “Yetser Hatov” (penchant pour le bien) ?! Servir avec le “Yetser Hara” (penchant pour le mal) consiste à lui résister et à le soumettre ; dominer les mauvaises tendances de notre personnalité. Mais comment servir avec le Yetser Hatov ?!
    Il répond par le verset (Devarim 12, 19) : “Lorsque tu feras ce qui est bon et ce qui est droit aux yeux de Hachem ton Dieu !”. Voici la “Avoda” (Service) avec le Yetser Hatov”.
    L’Homme peut utiliser ses moyens matériels, intellectuels, et spirituels pour accomplir des choses extraordinaires dans le sens du Service de Hachem. Mais l’épreuve se situe lorsque son action “bute” sur un obstacle à sa compréhension.
    Voici la grandeur de Moché Rabénou ! Après 80 ans de don total et continu de sa personne pour servir Hachem, au moment de faire acquérir la Parole de Hachem aux Bené Israël sous la forme des Lou’hot, il “sacrifie” toute l’oeuvre de sa vie, et brise les Lou’hot car il comprend qu’au-delà de sa propre démarche jusqu’à cet instant, telle est la Volonté de Hachem.
    Voilà une conclusion “à la hauteur” des enseignements des dernières Parachiot de la Torah, et des fêtes de Tichri.
    …Que l’inspiration de ces enseignements nous conduise à une nouvelle lecture de la Torah dès la première Paracha de la Torah, Beréchit, pour une nouvelle année d’élévation dans notre Avodat Hachem !

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Rav Eliezer RISSMAK     Yechiva OHALE YAACOV    
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