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La Paracha Haazinou est appelée “Chira” (Devarim 31, 30), “Cantique”, car elle est le “chant” de l’Histoire de l’élection des Bené Israël par Hachem (32, 9), jusqu’à l’aboutissement avec la Gueoula ultime (32, 43).
Après une introduction destinée à sensibiliser les Bené Israël au message de Hachem, la “Chira” aborde les sources de notre Histoire, en tant que Peuple choisi par Hachem pour être Son représentant dans l’Histoire humaine.
Pour comprendre le rôle particulier du Peuple Juif au coeur de l’Histoire du Monde, nous devons “plonger” jusqu’aux racines de l’épanouissement de l’humanité.
Le verset (32, 8-9) dit : “Lorsque Le Très Haut fit prendre possession (leurs territoires) aux peuples, lorsqu’Il dispersa les hommes, Il érigea les frontières des nations selon le nombre des Bené Israël. Car la “part” de Hachem c’est Son Peuple, Yaacov “‘Hével” de Son domaine “.
Le mot “‘Hével” employé dans ce verset donne lieu à diverses “traductions”, depuis “corde” (litt.) jusqu’à “lot” dans le sens d’une part “échue” en partage.
Ces versets ont donné lieu à de nombreuses interprétations. Voici quelques une de ces explications qui soulignent la spécificité fondamentale des Bené Israël :
Rav Chimchon Raphaël Hirsch souligne dans l’expression “lorsque Le Très Haut fit prendre possession aux peuples” l’emploi inhabituel du terme “Très Haut” pour désigner Hachem.
Il explique que Hachem a choisi le Peuple d’Israël alors que les peuples ne percevaient Hachem que comme “Le Très Haut”, en retrait face au monde matériel. Ils ne discernaient pas Son intervention dans les “affaires” du monde.
Après l’épisode de la tour de Bavel, Hachem attribua aux peuples leurs territoires à des endroits distincts du globe.
“Il (Hachem) dispersa les hommes” : la différence entre les diverses régions, ainsi que les particularités spécifiques de chacune, influencèrent les caractéristiques physiques et morales, la langue, l’activité, l’éthique et la nature de leurs habitants.
C’est ainsi que la famille de l’Homme initialement unie (tous descendants de Adam Harichone …), se diversifia en peuples variés. Chaque peuple représente une facette différente de la nature humaine.
Ce faisant, Hachem érigea les frontières des nations, et prépara les frontières en vue des Bené Israël qui existeraient ultérieurement.
“La part de Hachem est son Peuple” : La volonté de Hachem n’était pas que les Bené Israël deviennent une nation et s’épanouissent dans cette dimension selon les modalités d’un terroir particulier (Erets Israël, qui leur était destinée dès l’origine …).
A l’opposé des autres nations, les Bené Israël sont devenus un peuple avant-même de prendre possession d’une terre. Ce n’est qu’après que Hachem les ait façonnés en nation qu’Il les amena vers le pays qui leur était destiné, et leur ordonna d’en prendre possession.
“La part de Hachem est son Peuple ” : car en tant que “nation”, ce peuple est “le Peuple de Hachem”. Ce que les nations reçoivent de leur terroir (leur nature spécifique), Israël le reçoit de son lien à Hachem. Les peuples s’identifient à leur patrie : ils la conquièrent, puis puisent dans son climat les conditions de leur
épanouissement physique, spirituel, éthique et social. C’est pourquoi ils “divinisent” les “forces” dont ils perçoivent l’influence sur leur civilisation.
Israël, quant à lui, amène dans sa terre, sa définition physique, spirituelle, éthique et sociale, formée préalablement par “la Main de Hachem” !
Israël ne sera pas “asservi” à la terre et ne la laissera pas prendre autorité sur sa vie nationale.
Rav Hirsch poursuit son analyse de “Yaacov “‘Hével” de Son domaine”, et remarque l’appellation “Yaacov” choisie dans le verset.
“Yaacov” représente la dénomination “inférieure” par opposition à “Israël” !
Yaacov est issu du mot “Ekev” (le talon) (voir Beréchit, 25,26).
Dans toutes les “valeurs” dans lesquelles les hommes voient leur assise dans l’existence, il est démuni !
Peuple sans terre, sans puissance, sans aptitudes particulières, sans “brillant” spécifique dans les découvertes, les sciences et toutes les capacités sur lesquelles s’appuie l’humanité dans sa lutte pour dominer la nature, et par lesquelles se construit la vie de l’individu et de la nation ! (Même si les Juifs s’insèrent brillement dans les sociétés ambiantes, les qualités qu’ils manifestent ne sont pas les leurs, spécifiquement en tant que Bené Israël, mais une adaptation aux nations d’accueil …)
Les autres peuples se définissent à cette étape du développement de l’humanité par le slogan “faisons-nous un nom !” (Beréchit, 11, 4), et ils construisent alors la Tour de Bavel, monument à la gloire de l’Homme !
Il n’y a pas place, là, à une vie construite sur le dictat de Hachem de sanctification de l’existence, de vérité et d’équité et de ‘Héssed (don gratuit) !
Seul Yaacov, démuni de toute “possession” personnelle, était susceptible de recevoir toute son existence de “la Main de Hachem” !
C’est là le départ de la destinée d’Israël dans l’Histoire.
Rav Hirsch ajoute que Yaacov “échoit” en partage à Hachem, comme un “héritage” qui ne Lui vient qu’après l’abandon des propriétaires antérieurs. Ainsi, ce n’est que de l’absence d’interférence des forces qui façonnent les nations qu’Israël “échoit” en part à Hachem.
Voici comment, dès le début du développement de l’Humanité issue d’Adam Harichone, et, dans un nouveau départ, de Noa’h, lorsque l’Homme veut s’approprier le Monde en érigeant la Tour de Bavel, monument de sa grandeur, Hachem prépare l’avenir devant mener à Sa révélation ultime.
Bien sûr, le “choix” par Hachem ne détermine pas la destinée sans la participation active de l’homme lui-même !
Rav Mordekhaï HaCohen (Sifté Cohen, p.160) explique le mot “‘Hével” comme “corde”.
De même qu’une corde est constituée d’au moins trois brins, ainsi Israël est construit sur la base des trois Avot (Patriarches), Avraham, Its’hak et Yaacov, qui ont formé la racine du Peuple dédié à Hachem.
Rav Naftali Tsvi Yehouda Berlin (Haamek Davar, 32,9) explique que la nation d’Israël est définie comme une corde. Il explique que cette “corde” est soudée au sommet dans le contact avec Hachem, et se diversifie en bas (chez nous) en une multitude de brins.
Ainsi, au “sommet”, toutes les Nechamot (âmes) sont unies en une seule Nechama, tandis qu’en bas chacun est une Nechama distincte. C’est en cela qu’Israël est appelé “Peuple unique” dans le sens où tous sont unis dans leur racine supérieure.
Rabbi Yerou’ham Levovitz (Daat Torah, p.128) commence son explication de ce passage à partir du second verset : “La part de Hachem est son Peuple, Yaacov “‘Hével” de Son domaine “.
Il développe que le monde est diversifié dans toutes ses facettes : les plantes, les animaux se distinguent les uns des autres par une foule de particularités. A ce titre, chacun détient son identité spécifique, et il est ainsi à nul autre pareil. Il souligne qu’il en est, a fortiori de même pour l’Homme, “choisi” parmi les créatures ! Certainement, alors les hommes se diversifient en “espèces” différentes ; chaque nation possède sa réalité spécifique, que ce soit dans sa nature ou ses traits de caractère.
Rabbi Yerou’ham cite un extrait d’un Piyout (additif à la Tefila) destiné au Chabat précédant Chavouot : “le “terreau” du Olam Haba duquel les hommes dévoués à Hachem germent”. C’est le secret de l’existence du Clal Israël : Israël est le “plant” d’un terreau spécial.
De là “germent” les Mitsvot : Tsitsit, Tefilin etc…
Rabbi Yerou’ham cite le commentaire de Sforno (Vayikra 13, 57) qui souligne qu’au sein de l’espèce humaine, globalement dotée d’une dimension comparable au Créateur par l’intellect, Hachem a sélectionné le Peuple d’Israël pour son aptitude particulière à concrétiser le projet Divin dans la Création.
Rabbi Yerou’ham poursuit (p. 131) en citant une Kina (lamentation) de Tich’a BeAv dédiée à Tsion (Tsion halo tich’ali) qui chante les qualités du Siège de la Chekhina (Présence Divine). Erets Israël est le lieu prédestiné à l’épanouissement spirituel. Les Avot (Patriarches) ont soigneusement choisi l’endroit futur du Beth HaMikdach (Temple) pour y adresser leurs prières à Hachem, conscients de l’importance de l’endroit.
Chaque terre possède des “propriétés” spécifiques, les minéraux dont elle est dotée, le climat qui la caractérise, etc… destinés à favoriser l’épanouissement du peuple qui s’y développera.
Ainsi, Hachem a doté la Terre d’Israël des “éléments” nécessaires à l’épanouissement complet de Son Peuple. (Ne croyons pas que selon Rabbi Yerou’ham la nature d’Israël vient de sa terre ! il n’y a pas place à contestation sur le fait souligné par Rav Hirsch que la constitution initiale du Clal Israël s’est réalisée au moyen de la Sortie d’Egypte, et de son séjour dans le désert. Rabbi Yerou’ham souligne seulement que l’épanouissement complet ne peut se faire qu’à l’endroit approprié prévu par Hachem).
Rabbi Yerou’ham conclut que de nos jours, dans la situation de la Galout (exil) qui nous prive de la dimension réelle d’Erets Israël, l’épanouissement du Juif se fait dans l’enceinte de la Yechiva, lieu de la Torah.
Cette Paracha nous montre comment la “fin des temps” est d’ores et déjà inscrite dans l’origine de la Création.
L’Histoire n’est pas une suite “d’accidents”, mais le fil conducteur du Projet Divin dans la Création. Notre part consiste à choisir les options les plus conformes à la Volonté de Hachem pour nous insérer dans ce Plan qui aboutira, que Hachem fasse qu’elle arrive très bientôt ! à la Gueoula ultime.
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Rav Eliezer RISSMAK Yechiva OHALE YAACOV
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