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Parasha – 211 – Balak – 5785

בס »ד
La Paracha Balak décrit comment Bil’am, le « Prophète » des nations avait été sollicité par Balak, Roi de Moav, pour maudire les Bené Israël afin d’écarter le danger que les Moavites percevaient dans leur présence à leur frontière (Bamidbar 22, 2-20).
Dans le monde matérialiste dans lequel nous sommes habitués à vivre et qui ne connait que la puissance des armes, la démarche de Balak nous est totalement étrangère. C’est en soi un élément d’enseignement précieux pour rééquilibrer notre perception du fonctionnement du Monde, comme nous l’avons vu dans les précédentes Parachiot.
Cette Paracha est centrée sur le personnage de Bil’am, énigme profonde à nos yeux !
Comment comprendre que le même homme qui se targue de sa connaissance de Hachem (Bamidbar 24, 4) peut-il être rebelle au point de vouloir maudire ceux que Hachem a choisis comme Son Peuple ?!
Comment celui que nos ‘Hakhamim définissent comme ayant reçu un niveau de Prophétie comparable à celui de Moché Rabénou a-t-il pu chercher à anéantir les Bené Israël ?! (Midrach Sifri Parachat Berakha, 39)
Comment a-t-il même conseillé finalement à Balak de faire fauter les Bené Israël au contact des femmes de Moav (Rachi Bamidbar 31, 16) ?!
Comme nous l’avons vu au long des Parachiot de Bamidbar, même dans ses récits « historiques » la Torah est la source de vie que Hachem nous prodigue ! Quelles leçons devons-nous tirer, pour nous-mêmes, de cette Paracha dans laquelle il n’y a pas la moindre Mitsva ? Tout le message de cette Paracha tourne autour de Bil’am ! Quel point commun pouvons-nous avoir avec un personnage aussi vil ?!
Bil’am est en réalité un exemple de la « fragilité » humaine, et la Torah nous fait le récit de ses faiblesses pour nous enseigner la gravité des pièges que le Yetser Hara (Penchant du Mal) dresse devant chacun de nous…
Considérons donc Bil’am avec lucidité, dans la réelle mesure de quelqu’un qui a reçu un niveau spirituel exceptionnel dont la dimension nous échappe, mais dont les « enjeux » dans la vie sont comparables à ceux de chaque homme !
Au début de la Paracha, nous voyons que Bil’am décide de répondre à l’invitation de Balak, avec l’intention de contourner l’avertissement que Hachem lui a exprimé qu’Il ne le laisserait pas maudire les Bené Israël (22, 20-21).
Hachem lui envoie « message après message » : un Mal’akh (Ange) s’interpose sur son chemin, déclenchant le comportement anormal de son ânesse, jusqu’au point de faire parler l’animal pour le rappeler à la raison, puis de lui dessiller les yeux pour qu’il voie enfin lui aussi le Mal’akh (Ange) que Hachem a envoyé pour l’arrêter dans son élan (22-34).
Bil’am s’excuse alors face au Mal’akh de son « erreur » car il ne savait pas que le Mal’akh s’était dressé sur sa route. La compréhension superficielle de la réaction de Bil’am : « J’ai fauté car je ne savais pas que tu (le Mal’akh), te dressais face à moi ! » serait « je ne suis pas fautif, car je ne savais pas ! ».
Toutefois le Chela HaKadoch s’étonne : s’il ne savait pas, pourquoi dit-il « j’ai fauté » ?! Aussi, il explique totalement différemment : le fait de ne pas avoir perçu les avertissements que représentaient les écarts de son ânesse est une faute véritable ! L’Homme doit interpréter les évènements et comprendre les messages de Hachem. Bil’am avoue ainsi réellement une faute.
Rabénou Be’hayé souligne que Bil’am aurait dû être interpellé par le prodige de l’ânesse qui parlait. Comment a-t-il pu réagir en entrant naturellement en dialogue avec l’animal au lieu d’y voir là le Message Divin ?!
Le Gaon de Vilna (Adérèt Eliahoup.233) énumère les dix « épreuves » que Hachem a envoyées à Bil’am pour le réveiller. Alors qu’Avraham a surmonté dix Nissyonot (épreuves) et en est sorti grandi, Bil’am a échoué à comprendre les dix messages de Hachem pour le faire reculer !
De plus, après toutes ses tentatives ratées de maudire les Bené Israël, Bil’am ne quitte Balak qu’après lui avoir donné le conseil destiné à faire fauter les Bené Israël, et causer ainsi leur disgrâce aux yeux de Hachem. Et après cela, le verset dit : « Bil’am se leva, et alla, et revint à sa place … » (24, 25).
Rav ‘Haïm Zaytchik souligne que Bil’am n’a rien appris de ces péripéties, et il retrouve son approche négative naturelle (Mayené Ha’Haïm II, p.335). Rav Zaytchik remarque encore la déclaration de Bil’am : « Que ma personne meure de la mort des Hommes droits, et que ma fin soit comme eux » (23,10).
Il cite Rav ‘Haïm Benattar (Or Ha’Haïm), qui explique ce verset : Bil’am souhaite faire Techouva au moment de sa mort, et rejoindre les hommes droits. Le Or Ha’Haïm rapporte qu’il a vu des Rechaïm qui lui disaient explicitement que s’ils avaient su que dès qu’ils feraient Techouva ils mourraient, ils l’auraient fait. Mais, ils savaient que face aux sollicitations du Yetser Hara, ils ne tiendraient pas durablement avec la Techouva. Aussi, ils renonçaient d’emblée à faire Techouva …
Rav Zaytchik explique encore (Mayené Ha’Haïm I, p.285) la difficulté naturelle à abandonner la situation antérieure, dans toutes les circonstances de la vie. Mais encore plus lorsqu’il s’agit de prendre un nouvel élan dans la vie, avec un éveil provoqué par Hachem, les forces du Yetser Hara s’éveillent pour l’empêcher de s’élever. Mais si l’homme s’entête face à ces freins, il réussira (Rav Zaytchik, Or ‘Hadach, p. 889, au nom du Gaon de Vilna).
Rav Zaydel Epstein (Héarot, p.132) s’étonne qu’un homme pétri d’élans mauvais comme Bil’am ait pu recevoir la Nevoua (Prophétie), et de plus à un niveau élevé, au point d’être comparé en cela à Moché Rabénou ?!
Il répond en soulignant la différence entre une qualité « reçue » gratuitement sans effort de l’homme, et une qualité résultant d’un travail considérable sur lui-même, comme le dit la Guemara (Nedarim, 38a).
Bil’am n’a reçu la Nevoua que pour répondre à une revendication éventuelle des peuples que s’ils avaient eu un Navi comme Moché Rabénou, ils auraient servi Hachem (Bamidbar Rabah, 14, 20).
Même un homme choisi avec soin parmi l’humanité n’a pas pu s’élever au-dessus de ses pulsions sans le travail personnel qui caractérise les Tsadikim du Peuple Juif !
Bil’am est l’illustration de ce qu’il ne suffit pas de grandes révélations pour faire un homme. Toute sa Prophétie ne l’a pas élevé si peu que ce soit. Une fois privé de ce haut niveau reçu artificiellement, il retomba au niveau de « nécromancien » qui était le sien …
Mon Rav, Rav Rottenberg, zatsal, soulignait ainsi le contraste entre les deux versets (Beréchit 18, 33) « et Avraham revint à sa place« , et (Beréchit 32, 1) « et Lavan revint à sa place« .
Après la révélation du troisième jour après la Mila, et son plaidoyer face à Hachem pour éviter la destruction de Sedom, Avraham revient à son niveau spirituel élevé réel acquis par ses efforts.
Après que Hachem s’est adressé à Lavan pour lui signifier de ne pas importuner Yaacov qu’il a poursuivi après son départ, Lavan retombe à son niveau ordinaire. La révélation de Hachem ne laisse aucune trace chez lui … Dans chacun des cas, ce n’est pas la révélation Divine qui fait l’homme. Avraham le Tsadik se maintient en toutes circonstances à son niveau. Par contre Lavan, le Racha, ne tire pas profit de la révélation, et retrouve ses élans naturels.
Rav Tsvi Chraga Grossbard (Daat Chraga, p.128) cite la Michna ‘Avot 5, 19 : « Quiconque possède en lui ces trois caractéristiques est des disciples d’Avraham Avinou, et trois autres caractéristiques, des disciples de Bil’am : un œil favorable, un souffle bas, et des appétits réduits, des disciples d’Avraham Avinou ; un œil mauvais, un souffle haut, et des appétits larges, des disciples de Bil’am. »
Rav Grossbard fait remarquer que certainement les enseignements d’Avraham et de Bil’am différaient et il est évident que leurs disciples ne pouvaient pas être comparables, car sinon quel sens aurait la comparaison ?! Il répond qu’en réalité la Michna nous enseigne qu’avec la même Torah, les résultats sont diamétralement opposés en fonction des Midot (traits de caractère) de chacun des Maîtres.
Rav Yehouda Leib ‘Hassman (Or Yahel, Balak) développe que la Michna parle de situations où il s’agit de prime abord de Maîtres prestigieux, dont les enseignements sont comparables. Toutefois chez l’un se manifestent les qualités d’Avraham, tandis que les traits de caractère de l’autre laissent à désirer. C’est là la comparaison entre Avraham et Bil’am, et entre leurs disciples respectifs…
Nous voyons de ces quelques éclairages à quel point notre Paracha est pleine d’enseignements pour chacun de nous dans les facettes de notre existence.
Prions Hachem de nous donner les forces d’affronter les Nissyonot de la vie avec lucidité et force, pour avancer dans le chemin des Yecharim.

