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Parasha – 190 – Michpatim 5785

בס »ד
La Paracha Michpatim suit immédiatement la Paracha Yitro, Paracha de la révélation de Hachem au Har Sinaï, où Il nous a donné la Torah. Dans le Dvar Torah de la Paracha précédente, nous avons vu les explications du Ramban (Chemot 21, 1) qui explique que cette Paracha développe le dernier des Dix Commandements « Lo Ta’hmod », « Ne convoite pas ». C’est le respect du bien d’autrui qui est développé à travers toutes les règles relatives aux rapports entre les hommes dans la société de la Torah.
De prime abord, il semblerait qu’il s’agit ici d’un « Code Civil » destiné au Peuple Juif. Sous cet angle, on peut s’interroger sur la particularité de ce « code » ?!
Chaque société se dote d’un ensemble de règles destinées à harmoniser les relations humaines, sans lesquelles la vie ne serait pas tenable, ni pour chaque individu, ni pour l’ensemble de la société. Même les groupes de malfaiteurs ont leur « code » de fonctionnement !
Toutefois Rachi introduit la Paracha en soulignant que le premier mot est précédé de la lettre « Vav » – « et », qui est une conjonction de coordination, qui rattache les lois de cette Paracha à celles de la précédente. De même que les lois ci-dessus nous sont venues « du Sinaï », c’est-à-dire par la Révélation de Hachem lorsqu’Il nous a octroyé la Torah, ainsi les lois « civiles » de la Paracha Michpatim sont liées à la Révélation de Matane Torah (Don de la Torah).
Rachi ajoute que le mot « lifnéhem » (devant eux) dans le verset (21,1) désigne les Juges Juifs, et vient exclure de porter un différend entre Juifs devant une juridiction non-juive, même s’ils sont connus comme jugeant un tel cas selon les mêmes règles qu’un tribunal Juif.
Nous voyons ainsi que la Torah ne considère pas le règlement d’un différend comme une simple démarche « pratique », destinée à protéger celui qui est dans son « bon droit », et à éviter les conflits sociaux dévastateurs.
Rabbi Yerou’ham Levovitz (Daat Torah, p. 221) explique abondamment la différence fondamentale entre les « codes » humains, issus de la raison humaine, et les lois de la Torah. Les lois humaines changent de moment en moment au grédes humeurs de l’époque, et sans la moindre cohérence d’un article à un autre. Les lois de la Torah, par contre, qui nous ont été dictées par Hachem, sont immuables, comme la nature des créatures et en particulier le fonctionnement de l’Homme. L’Homme aura toujours deux yeux et deux oreilles, et le reste de son corps de même.
Rabbi Yerou’ham ajoute que les lois de la Torah, comme le cinquième Commandement, le respect des parents, ne sont pas dues aux « circonstances », en l’occurrence le fait que nous venons au Monde par le biais des parents, et pas de toute autre manière. Il est bien évident que Hachem pouvait moduler le fonctionnement du Monde comme Il le voulait, et Il aurait pu initier la succession des générations sans « procréation ». C’est Son choix d’intégrer à la Torah une Mitsva de respecter les parents qui a justifié la structuration du Monde comme nous le connaissons, avec la participation des « parents » à la venue au Monde de la génération suivante, ouvrant la place à la Mitsva …
Le Midrach sur la Paracha enchaine les paragraphes qui décrivent la grande importance que Hachem accorde à la Justice, et à son exercice par les Juges du Peuple Juif.
Les versets des Neviim (Prophètes) soulignent l’importance des « Michpatim » (Lois « civiles ») de la Torah.
-Yirmeya (22, 16) : »Il jugeait l’affaire du pauvre et de l’indigent, alors c’était bon pour lui, n’est-ce pas Me connaitre – Parole de Hachem ! »
-Mikha (6, 8) : « Un homme t’a-t-il dit ce qui est bien, et ce que Hachem exige de toi, si ce n’est de faire le Michpat, et aimer le ‘Hessed etc. … »
-Yirmeya (9, 22-23) : « Ainsi a dit Hachem : que le Sage ne se loue pas de sa sagesse, et que le fort ne se loue pas de sa force, et que le riche ne se loue pas de sa richesse ! Mais que de cela se loue celui qui se louera : de ce qu’il comprend et Me connait, car Je suis Hachem Qui fait le ‘Hessed, le Michpat et la Tsedaka sur Terre, car ces choses Je les ai choisies, parole de Hachem »
-Dans Tehilim (147, 19-20), David Hamélekh dit : « Il (Hachem) exprime Ses Paroles à Yaacov, Ses ‘Houkim (Décrets) et Ses Michpatim (Lois « civiles ») à Israël ; Il n’a pas fait ainsi pour un peuple quelconque, et les Michpatim ils ne les connaissent pas ; louez Hachem ! »
Cette insistance appelle explication ! Au-delà de la remarque de Rabbi Yerou’ham sur l’absence de cohérence dans les démarches « civiles » des nations, la Torah ne peut pas se valoriser simplement par le fait qu’elle ne partage pas un défaut grave avec les « codes » des peuples. Une telle comparaison serait une valorisation « négative », et il est clair que la véritable grandeur de la Torah est intrinsèque, positive, et pas par contraste avec les manques des « systèmes de valeurs » humains.
Rav Zaïdel Epstein (Hèarot, p.118) s’interroge sur l’importance que la Torah accorde aux Michpatim ?!
De prime abord, ils ne s’appliquent que lorsque l’Homme arrive à un niveau d’infériorité extrême, dans des conflits de dommages, de vol ou de meurtre. Rav Epstein rapporte les paroles de Rav Chlomo Harkavi (MéImré Chlomo, I, p.167) qui explique la différence entre ces corps de lois, et le sens du verset de Tehilim qui nie aux non-juifs le moindre lien avec les Michpatim.
Les lois civiles des nations ont pour but de protéger le fonctionnement de la société, sans le moindre accès aux traits de caractère de la personne humaine, et à la grandeur de l’Homme. Ce ne sont que des consensus sociaux basés sur la peur de la punition.
Seule la Torah, expression de la Sagesse Divine, peut plonger dans les profondeurs de l’âme humaine, chose inaccessible à l’intelligence même de l’homme à l’esprit le plus développé.
Rav Harkavi poursuit son analyse, en remarquant que le sujet à la base des « Michpatim » selon notre perception simple est les conflits humains, soit des sujets « peu glorieux » !
A l’opposé, les Michpatim que Hachem nous dicte dans la Torah sont empreints de la « connaissance » profonde de l’Homme par son Créateur et traitent de notions élevées de la grandeur de l’Homme Créature supérieure de Hachem !
Dans une vie basée sur la Torah, les efforts de chacun ne sont pas motivés par les sanctions, mais pour se hisser à la reconnaissance de la valeur fondamentale de L’Homme !
En réalité les lois de la Torah prévoient de telles conditions pour l’application des sanctions qu’elles ne suffiraient pas à assurer l’ordre social si les hommes ne fournissaient pas des efforts personnels pour respecter l’harmonie profonde que ces lois visent à faire régner dans le Peuple de Hachem.
Le Ran (Grand de la Torah à l’époque des Richonim, quatorzième siècle du décompte moderne) définit dans son Drouch 11 que, face aux conditions d’application des règles de la Torah qui ne satisferaient aux besoins de l’ordre social, du fait d’un manque d’élévation spirituelle des gens, le rôle « civil » de la justice est rempli par la fonction du Roi qui a pouvoir de sanctionner en dehors des lois de la Torah. Les Juges du Peuple de Hachem ont pour fonction d’élever la conscience de l’importance des règles de comportement dictées par la Torah.
Rabbi Moché Alchikh introduit la Paracha Michpatim en expliquant la dimension de « Kedoucha », la reconnaissance de la « Royauté Divine » qui transcende la Création des plus hauts niveaux spirituels jusqu’au niveau de notre « quotidien matériel ». L’application par le Juif des lois de la Torah imprègne toute la Création de Kedoucha.
Effectivement, de tels Michpatim, les peuples de la terre ne peuvent pas y accéder, comme le dit le verset de Tehilim cité plus haut !
Rachi (Beréchit 1, 1) cite les Midrachim qui expliquent que le mot « Beréchit » (par le « Réchit » – « début ») par lequel commence la Torah ne veut pas dire « au commencement », mais « pour le « Réchit », signifiant que Hachem a créé le Monde pour ce qui se définit comme « Réchit » – « Tête », la chose la plus importante pour laquelle cet acte de Création a été réalisé. Le Mot « Réchit » désigne ainsi diverses choses, dont la Torah, le Peuple d’Israël etc. …
A l’opposé d’une conception « accidentelle » du Monde, la Torah nous définit d’emblée la Création avec son objectif. Cet objectif est l’accomplissement de l’Homme par son lien avec Hachem. Ce but se réalisera par l’intégration de la Torah dans la conscience profonde d’Israël.
Nos ‘Hakhamim (Midrach Rabah Beréchit 1, 1) introduisent le « récit » de la Création en définissant la Torah comme le « plan » du Monde, comme un plan d’architecte !
Le Ramban souligne (Chemot 21, 6) que les Juges d’Israël sont désignés dans la Torah par le mot « Elo-him » qui désigne par ailleurs l’Intervention de Hachem dans le Monde, ce que nous appelons la « Midat HaDin », lamesure de Justice. Cette notion définit « l’Ordre » que Hachem fait régner dans la Création, que ce soit à travers les « lois de la nature » ou par Son intervention dans notre quotidien en réponse à nos actes. Seul Israël justifie d’une telle Présence Divine dans son existence, comme nous l’exprimons en appelant Hachem « Elo-hénou », notre « Elo-him », qui ne se manifeste ainsi que dans le quotidien du Peuple Juif.
Rav Chimchon Raphaël Hirsch développe (Chemot 21, 6 ; Beréchit 1, 1) que le mot « Elo-him » est lié à la racine « élé » – « ceux-ci ». Ce mot désigne la pluralité manifeste dans le Monde, et le « Nom » de Hachem » Elo-him » souligne que Hachem fait converger tous les éléments distincts de la Création, Il est « le Maitre » de toutes les forces apparemment divergentes du Monde. Tel est également le rôle attribué aux Juges d’Israël : mettre en évidence l’Unité fondamentale de la Création.
C’est aussi ce qu’exprime la Michna (Avot 5, 16) : « Toute « Ma’hlokèt » (partage d’opinion) qui est « LeChem Chamaïm » (« Au nom du Ciel ») est destinée à s’accomplir … ». Le Maharal explique que le partage d’opinion des ‘Hakhamim comme Hillel et Chamaï participe du but de la Création comme l’opposition apparente entre le feu et l’eau. De même que la multiplicité des forces dans la nature vient révéler l’Unicité du Créateur, ainsi la Torah vécue dans le Peuple de Hachem a ce même rôle de manifester la Présence du Créateur.
Telle est donc la grandeur profonde des règles « civiles » de la Paracha Michpatim qui les place au sommet de la Révélation Divine, juste après les Dix Commandements !

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