בס »ד
Avec la Paracha Terouma, nous entrons dans les Parachiot consacrées au Michkan (Tabernacle) que Hachem a ordonné de confectionner dans le Désert.
La notion même du Michkan est surprenante.
– Comment comprendre que nous « réduisions » la Présence de Hachem à un petit local, si prestigieux soit il ?! En quoi se différencie cette démarche des constructions de « temples » dédiés aux diverses idolâtries ?!
De plus, la Torah met l’accent sur la « collecte », la Terouma destinée au Michkan (Chemot 25, 1-7) : « Parle aux Bené Israël, et qu’ils prennent pour Moi une Terouma, de chaque homme que son cœur le poussera à donner, vous prendrez Ma Terouma » !
– Était-ce si difficile pour les Bené Israël de confectionner le Michkan que Hachem ait jugé utile d’insister sur la Terouma ?! Ne suffisait-il pas, comme dans tout besoin collectif de prélever sur les contributions ordinaires encaissées de chaque « citoyen », sans définir une procédure spéciale ?! Et où se situe la place réelle des hommes dans cette collecte qui ne s’applique somme toute qu’à des « cadeaux » issus de ce que Hachem Lui-même donne à l’Homme ?!
– Et pourquoi la Torah exprime-t-elle cette Terouma en disant : « et qu’ils prennent« , au lieu de : « et qu’ils donnent » ?!
– Et que signifie : « qu’ils prennent pour Moi » ?
– Et si effectivement Hachem voulait une participation volontaire, pourquoi le Michkan a-t-il dû faire l’objet d’un appel à tous, au lieu de se limiter à quelques « donateurs importants », comme c’est généralement le cas dans la construction d’une Yechiva ou d’un Beth Haknesset (Synagogue) ?!
De plus moins d’un an après avoir « vidé » l’Egypte de ses richesses en deux étapes, lors de « l’emprunt » auprès de égyptiens (Chemot 12, 35-36), puis après le passage de la Mer (Rachi 15, 22) les Bené Israël ne manquaient certainement pas de moyens !
– Et pourquoi la Torah précise-t-elle avec tant d’insistance les modalités de collecte des matériaux ?! Pourquoi ne pas accepter tous les dons, quitte à les céder ensuite pour acquérir les matériaux nécessaires, comme ce serait le cas ultérieurement pour l’entretien du Michkan (Tabernacle), et du Beth HaMikdach (Temple) ?
Rachi explique que « pour Moi » veut dire « Lichmi » – « pour Mon Nom ». C’est-à-dire que la Terouma doit être faite « Lichma », uniquement pour le Nom de Hachem. Il faut accomplir cette Mitsva en se « hissant » à un haut niveau où on s’affranchit de toutes les motivations personnelles !
Le Malbim explique que l’emploi du verbe « qu’ils prennent » plutôt que « qu’ils donnent », focalise la Mitsva sur les « collecteurs » plutôt que sur les « donateurs » pour ne pas que chaque Juif soit astreint à donner. Hachem voulait que cette Terouma vienne de l’élan du cœur et de la volonté libre, et non d’une quelconque obligation. Aussi la Mitsva est dirigée vers ceux qui collectent, laissant la liberté à chacun de décider de donner.
Rav Tsvi Chraga Grossbart (Daat Chraga, p.164) souligne que la notion de don ne s’applique pas aux matériaux, puisque tout « appartient » à Hachem. C’est donc essentiellement l’élan du cœur qui constitue la Terouma. Il explique qu’à la différence des autres Mitsvot qui gardent une dimension de Mitsva même si elles ne sont pas accomplies » Lichma », la construction du Michkan qui amène la Présence de Hachem, le sommet de la réalisation du Monde, ne peut résulter que de la pureté du cœur de chaque Juif.
Le Malbim ajoute que la Terouma devait impérativement être composée des matériaux directement utilisés pour le Michkan, et non de « valeurs » qui auraient été échangées par la suite. Cela souligne encore le fait que la valeur des dons résidait dans l’élan du cœur et non dans leur valeur financière. Il remarque aussi que la Terouma doit être reçue « de chaque homme » et ne pas se limiter à des dons importants de quelques-uns. Et puisque tout ce qu’on peut donner ne nous appartient pas réellement, mais reste « entre les Mains de Hachem », ce n’est qu’en l’offrant pour la Mitsva qu’on l’acquiert rétroactivement de telle sorte que ce soit bien un don provenant de nous. Ceci explique le verbe « qu’ils prennent », car en donnant ils prennent possession véritablement de l’objet de leur don.
Rav Chimchon Raphaël Hirsch fait remarquer que bien que la Terouma soit l’expression de l’élan personnel de chacun, la Terouma doit être « réceptionnée » (« qu’ils prennent ») par des représentants de la communauté, pour être ensuite présentée à Hachem comme un mouvement collectif. La réalisation du Michkan n’est pas l’œuvre des individus, mais de la communauté.
Rav Zalman Sorotskin (Oznaïm LaTorah, 25, 2) comprend le mot « Veyik’hou », « qu’ils prennent » comme s’appliquant aux « collecteurs ». Ainsi, la Mitsva « Li » – »Lichmi » (pour Mon Nom) qu’a soulignée Rachi vient imposer l’effort de s’élever au-dessus de ses motivations personnelles jusqu’aux « collecteurs ». Et bien qu’ainsi on bride l’énergie des « collecteurs » qui doivent agir avec retenue pour s’assurer de rester fidèles à ce haut niveau de conscience du but de leur intervention, Hachem ne veut pas de dons « arrachés » même par un effort de persuasion face à un « donateur » réticent …
Nous voyons ici que la préparation du Michkan doit effectivement exprimer à tous les niveaux un élan du cœur, et aucune trace d’un élan d’individualisme.
Comme nous l’avons vu dans le Dvar Torah sur la Paracha Terouma 5782, la « Kavana » (l’intention profonde) des donateurs influait ainsi sur la réalisation finale.
C’est ainsi qu’il est rapporté au nom du Gaon de Vilna que si dès le départ, un Beth Haknesset était construit (y compris la confection de la hache pour couper le bois …) « LeChem Chamaïm » (au nom du « Ciel »), il ne pourrait pas s’y exprimer de Tefila avec une pensée étrangère !
C’est l’explication de la Guemara (Baba Metsia 85b) qui rapporte que Rabbi ‘Hiya enseignait la Torah aux petits enfants (‘Houmach et Michna) afin que la Torah ne s’oublie pas dans le Peuple Juif. Pour ce faire, il écrivait des ‘Houmaché Torah (les cinq livres de la Torah) qu’il confiait aux enfants. Pour confectionner ces ‘Houmaché Torah, il semait du lin, afin d’en faire des filets avec lesquels il capturait des cerfs dont il utilisait la peau pour écrire les Sifré Torah.
N’aurait-il pas été plus « efficace » de consacrer directement son énergie à enseigner la Torah, sans « perdre de temps » à préparer lui-même les matériaux depuis le lin pour les filets ?!?
Rabbi ‘Hiya nous révèle ici l’impact de la Kavana depuis les moindres préparatifs sur les résultats. »
Le Midrach (Chemot Rabah 33, 1) commence son commentaire de notre Paracha par un parallèle avec la Torah. Le Midrach souligne les qualités sous tous les aspects de la Torah, en la comparant à toutes sortes d’acquisitions. Le lien entre le Michkan n’apparait pas immédiatement, dans le développement sur les qualités du cadeau que Hachem nous a accordé. Toutefois ce paragraphe se termine par la comparaison avec un Roi qui, après avoir donné sa fille unique en mariage, demande à avoir une petite « chambre » chez son gendre pour pouvoir accompagner sa fille qu’il ne peut pas délaisser.
Ainsi Hachem, après nous avoir donné la Torah « en mariage », souligne qu’Il ne peut pas se séparer d’elle. Nous en priver n’est pas non plus envisageable.
Tel est le sens du Michkan, une « Résidence » réduite pour Hachem parmi nous. Cette parabole ne doit évidemment pas être considérée au sens littéral. Ce n’est pas « pour Hachem » qu’il faut ménager une place parmi nous. C’est plutôt pour préserver la dimension élevée de la Torah chez nous, afin qu’elle garde sa dimension de « fille du Roi », qu’il nous incombe de confectionner le Michkan pour garantir la permanence du niveau spirituel de notre quotidien de Peuple de la Torah Divine.
Dans le même sens, Rav David Powarski (Yichmerou Daat, p. 176) applique toutes les qualités du Michkan (Kavana « pour Hachem », et « Présence de Hachem » parmi nous) aux Yechivot, qui perpétuent le Michkan après la destruction du Beth HaMikdach.
Rav Moché Ye’hiel Epstein (Beér Moché, p.759) rapporte au nom du Toldot Yaacov Yossef que lorsqu’un homme a un doute comment « servir Hachem », il doit chercher l’inspiration dans ses aspirations personnelles. S’il voit qu’il aspire à l’amour d’autrui à son égard, il doit s’éveiller par cela à diriger son propre sentiment vers l’amour de Hachem. S’il ressent une crainte matérielle quelle qu’elle soit, il doit s’en inspirer pour « élever » ce sentiment de crainte en « Yir’at Chamaïm » (« crainte-respect » de Hachem) …
Rav Epstein souligne qu’il ne s’agit pas ici d’une ambition élevée de sublimer ses pensées, niveau qui ne concerne que les êtres exceptionnels. Nous devons seulement utiliser nos « mauvais traits de caractère » pour orienter nos efforts vers Hachem, en nous efforçant de les « réorienter ».
Il explique ainsi la Michna (Avot 2, 1) » Saches ce qu’il y a au-dessus de toi ». Il interprète la Michna ainsi « Saches pour être agréé « en Haut » (chez Hachem), « de toi » – examine tes propres volontés et oriente les vers le « Service de Hachem ».
Rav Epstein explique pareillement le verset : « de chaque homme que son cœur le poussera à donner, vous prendrez Ma Terouma » ! : de chaque volonté du cœur, « vous prendrez » exemple pour chercher à être agréé par Hachem « Ma Terouma » !
La confection du Michkan n’est pas un évènement du passé !
A chaque pas, nous pouvons et devons chercher à « construire » notre Michkan personnel, dans un quotidien permanent de « Yechiva-Michkan ».
שבת שלום – Chabbat Chalom !