Parasha – 123 ‘Hanouka 5784

בס »ד

La fête de ‘Hanouka nous fait revivre la victoire et la Gueoula (Délivrance) de la Galout (l’ »Exil ») Yavane (la domination par le Royaume Grec du Nord).

Il ne s’agit pas de la Grèce elle-même, mais du Royaume d’un des héritiers d’Alexandre Le Grand qui s’étaient partagés les territoires conquis après sa mort. C’est donc ici de la culture grecque plutôt que de la nation et de son pays qu’il est question.

La particularité de cette Galout est qu’elle a eu lieu sans qu’il y ait eu un déplacement de la population, et alors même que le Beth HaMikdach se dressait au sein de Yerouchalaïm.

Nous touchons là au sens réel de la Galout. La Galout ne consiste pas en un « exil » physique, mais un « exil » spirituel. Le Peuple de Hachem est en quelque sorte « chassé » de lui-même et de son identité profonde.

Rav Dessler explique que la Galout consiste essentiellement dans l’épreuve de l’environnement auquel nous sommes confrontés (Mikhtav MeEliahou, III, p.208). Les vicissitudes et brimades qui accompagnent cette épreuve n’ont comme rôle que d’accentuer l’épreuve. Il conclut que ceux qui conservent avec puissance leur Emouna et leur attachement à La Torah, et sont conscients que l’avenir et l’éternité leur appartiennent, et que la réussite matérielle de leur environnement n’est qu’apparente et éphémère, ceux-ci ont réellement surmonté l’épreuve de la Galout. Dans une « considération fondamentale », ils sont d’ores et déjà « Gueoulim » (délivrés) de la Galout, puisque l’environnement n’a aucune influence sur eux !

Nous voyons ainsi que la Galout pouvait effectivement se dérouler dans les circonstances de ce que nous appelons « Galout Yavane ».

Les 4 Galouyot sont déjà annoncées dès le début de la Torah, dans le second verset de Beréchit : « …et la Terre était « tohou vavohou » et les ténèbres sur la face de l’abime …et le Souffle de Dieu planait sur la face des eaux « .

Le Midrach (Beréchit Rabah, 2, 4) interprète ce verset comme se rapportant aux « Royautés » qui vont dominer le Monde :

-« Tohou » c’est le royaume de Bavel …

-« Vavohou » c’est le royaume de Madaï (les Mèdes, associés aux Perses dans un empire commun : l’époque où a eu lieu le Miracle de Pourim) …

-« Ve’hochèkh » (les ténèbres) c’est le royaume de Yavane, qui a obscurci les yeux d’Israël par leurs décrets car les Yevanim leur disaient : « écrivez sur la corne du taureau que vous n’avez pas part dans le Dieu d’Israël …

-« Al pené tehom » (sur la face de l’abime) c’est le royaume malfaisant qui est insondable comme l’abime …

-« Veroua’h Elokim mera’héfet …  » (et le Souffle de Dieu planait …) c’est le souffle du Roi Machia’h … par le mérite de la Techouva !

Rav Its’hak Zeev Yadler explique que le but de la Création est de prodiguer à l’Homme le bien éternel, et que le seul mérite qui permet d’y accéder est la Emouna dans les moments de « voilement » de la Présence de Hachem. C’est pourquoi Hachem a préparé dès la Création les 4 royautés par l’épreuve desquelles nous nous purifions pour accéder par cela au bien éternel (Tiféret Tsion sur ce Midrach).

Il nous reste à comprendre la particularité du « voile » que constitue chaque Galout face à la Présence de Hachem, et pour ce concerne ‘Hanouka, la dimension spécifique de Yavane.

Rav Dessler développe que chaque Galout est liée aux fautes qui la précèdent. L’épreuve consiste ainsi à prendre conscience de nos manques en faisant face à ces défauts exagérés au sein des nations auxquelles nous sommes confrontées dans la Galout (Mikhtav MeEliahou III, p.207 et suivantes). Un tri s’opère entre ceux qui font face à l’épreuve et sortent de la Galout, (individuellement comme mentionné plus haut), et ceux qui cèdent à l’atmosphère ambiante.

Rav Avigdor Miller cite l’exemple d’un personnage célèbre, d’un très haut niveau spirituel qui succomba à l’épreuve : Elicha Ben Abouya, contemporain de Rabbi Akiva, qui était un des Grands de la génération, et qui déclina par faiblesse face à la « puissance » romaine, et devint un renégat qui alla jusqu’à dénoncer ses frères Juifs aux Romains (Or Olam I, p.337).

Rav Its’hak Hutner développe qu’en ce qui concerne la Galout Yavane, la confrontation se situait au niveau de la « sagesse » qui caractérisait la culture grecque, précurseur de toutes les démarches modernes de science et d’art (Pa’had Its’hak, ‘Hanouka, Maamarim 5 et 6). Yavane représentait le « challenger » d’Israël dans le domaine de la « Sagesse », avec le culte de la beauté dans tous les domaines, qui caractérisait leur conception de la « Sagesse ». A l’opposé de la démarche d’Israël, la « Sagesse » n’était pas pour la Grèce une valeur spirituelle, destinée à rapprocher l’Homme de son Créateur, mais un moyen « technique » d’améliorer et d’embellir l’existence matérielle.

Rav Hutner souligne également que la Galout Yavane est la seule qui a généré des « hellénisants ». En effet, il n’y eut pas à Bavel de « bavélisants », ni à Madaï de « Madaïsants ». La particularité de ces renégats qui tournaient le dos à leur Peuple pour l’entrainer vers l’adhésion à la culture grecque, qui commença avec Yavane, ne nous a plus quitté au fil des générations, et ne disparaitra qu’avec la Gueoula (Délivrance) Ultime (Pa’had Its’hak, 5, 4).

Rav Hutner souligne (5, 3) que cette dimension est liée au fait qu’à partir de Yaacov Avinou, l’identité Juive est inaltérable. En rejetant son lien aux Avot et à Hachem, Essav a perdu la qualité de descendant des Avot.

Par contre, tous les descendants de Yaacov restent Juifs, pour l’avantage, mais aussi pour la conséquence fatale qu’ils « encombrent » le Peuple Juif avec leurs désordres personnels. Ainsi l’issue de la Galout Yavane passa par la victoire sur les « Mityavnim » (les hellénisants) autant que sur les Yevanim mêmes. (Rav Chimchon Raphaël Hirsch, Sidour : explication du passage dédié à ‘Hanouka « Tu as livré « Zédim » (les mauvais) entre ceux qui mettaient leur énergie dans l’étude de la Torah).

Mais où se situait alors la faille dans le Peuple Juif qui a ouvert la porte à cette Galout spécifique ?

Le Ba’h (Tour Ora’h ‘Haïm, 670) explique qu’à l’époque de ‘Hanouka, la faute consistait en un « affaiblissement » de la Avoda (le Service de Hachem). C’est pour cette raison que Hachem décréta de les « priver » de la Avoda par les décrets des Yevanim.

Et lorsqu’ils revinrent dans leur Techouva jusqu’à donner leur vie pour la Avoda, Hachem les sauva des Yevanim.

En quoi pouvait consister leur « affaiblissement » dans la Avoda, puisque jusqu’à l’invasion des Yevanim, ils accomplissaient la Avoda quotidiennement dans le Beth HaMikdach ?!

Rav Hutner souligne (6, 5) que le 8 Tevet était respecté comme jour de Jeûne car c’était le jour où la traduction de la Torah en grec par les 70 ‘Hakhamim que Ptolémée (Roi Hellénique du Royaume d’Egypte) avait contraints à ce projet avait été achevée. L’objectif de Ptolémée dans cette traduction était de « gommer » la frontière entre Israël et les nations, et ainsi de rendre « profane » la Torah, parmi l’ensemble des connaissances humaines. C’est en cela que consiste « ‘Hochèkh » (les ténèbres) que le Midrach sur le verset de Beréchit relie à Yavane. Sortir de la dimension exclusive de Kedoucha (la « Sainteté ») de la Torah qui nous rattache à Hachem, il n’y a pas de plus graves ténèbres !

Les explications de Rav Dessler sur le mécanisme des Galouyot, ainsi que de la remarque du Ba’h, peuvent nous aider à comprendre que les Bené Israël qui vivaient à l’époque qui précéda l’agression de Yavane portaient en eux le germe de cette « maladie » que représente Yavane. Apparemment, la culture de la beauté, même sans arriver jusqu’à la hisser en principe directeur de l’existence, avait exercé un certain attrait sur le Peuple Juif, les amenant à dépasser les strictes limites de l’accessoire qu’est la Mitsva d’embellir les Mitsvot.

Chaque Galout est précédée d’un « dérapage » même « infime » dans les orientations du Peuple de Hachem qui donne place à l’épreuve de l’environnement correspondant.

Nous vivons jusqu’à nos jours dans la continuation de la Galout Yavane, dans la mesure où les manifestations des « hellénisants » n’ont jamais cessé de nous accompagner au fil des générations sous des formes toujours renouvelées.

Les explications de Rav Dessler, ont montré que la Gueoula, individuelle ou collective, dépend de la mesure dans laquelle on réussit à s’affranchir de l’influence de l’environnement. Toute complaisance face à la culture des nations constitue en nous une trahison de notre identité profonde. Israël n’a rien à envier, ou à intégrer des nations qui nous entourent. Les générations qui nous ont précédé au fil des siècles avaient à cœur de s’isoler des nations, non seulement physiquement en se regroupant dans des zones d’habitation distinctes, mais en gardant un langage spécifiquement Juif. Que ce soit le Yiddish, le Judéo-arabe, le Ladino ou encore l’araméen que parlaient les Juifs du Kurdistan, différemment de leurs voisins Kurdes, les Juifs ont toujours eu à cœur de protéger l’atmosphère de la rue Juive.  Dans le « monde moderne », nous vivons une forme accentuée de l’épreuve de la Galout. Aujourd’hui, Il nous semblerait impensable de renoncer à l’intégration dans le monde des affaires et de la Technique. Et pourtant c’est dans la mesure où nous réussirons à régénérer nos valeurs profondes pures de toute influence des « idées » du « vaste monde » que nous atteindrons la Gueoula Totale de la Galout.

Tel est le message de ‘Hanouka, et de ses petites lumières « vacillantes » qui partent chaque année à l’assaut de l’assimilation « rampante » que nous infligent les nations et leurs ambassadeurs, les « Mityavnim » (les hellénisants).

חנוכה שמח !