בס »ד
La Paracha Nitsavim débute en présentant une facette complémentaire du « Brit » (l’Alliance) que Moché Rabénou a conclu entre Hachem et les Bené Israël (Devarim 29, 9-28).
Nos Commentateurs le qualifient de Brit de responsabilité réciproque. Chacun des Bené Israël est responsable du respect des autres de l’engagement envers Hachem.
Après cela, la Paracha enchaine sur le sujet de la Gueoula ultime par : « …Et ce sera lorsque viendront sur toi toutes ces choses, la Berakha et la Kelala … » (30,1). Hachem annonce ici l’aboutissement final de l’Histoire de la Création.
Et d’emblée, ces trois versets (3-5) qui annoncent la Gueoula soulèvent notre enthousiasme !
– « …Et Hachem ramènera ton retour et aura de la miséricorde pour toi ; et Il reviendra et te rassemblera d’entre tous les peuples où Hachem ton Dieu t’a dispersé « .
– « …Si ton « banni » est au bout du Ciel, de là-bas Hachem ton Dieu te rassemblera et de là-bas Il te prendra ».
– « …Et Hachem ton Dieu t’amènera vers la Terre qu’ont hérité tes pères, et tu en prendras possession ; et Il te fera du bien, et te rendra plus nombreux que tes pères ! »
Ces versets qui nous promettent le retour tant attendu en Erets Israël font vibrer notre cœur, et il est facile d’oublier les versets qui les entourent et expliquent les modalités de cette Gueoula !
Dans les dernières générations, beaucoup ont basé toute leur approche de l’existence sur ces promesses, sans se préoccuper de comprendre ce qui justifierait leur accomplissement justement maintenant.
Nous vivons une période agitée par un abandon considérable de la Torah.
Les divers courants de la « Haskala » (l’aspiration à la culture étrangère) ont submergé nombre de nos frères. Depuis, l’idée d’une « solution du problème de l’antisémitisme » par une conversion collective des Juifs, jusqu’à la fondation d’un pays juif « laïc », ces mouvements continuent à causer des tensions qui rappellent, et peut-être même en plus grave, les conflits de l’époque du second Beth HaMikdach (le Temple). Les Juifs fidèles à la Torah devaient alors faire face aux factions des Mityavnim (Hellénisants) sous la domination des Séleucides, puis des Tsedokim (Saducéens) sous la domination romaine.
– Pouvons-nous réellement croire que nous avons droit à la « Gueoula « gratuite », sans avoir l’ombre des mérites de nos pères de toutes les générations qui nous ont précédé qui vivaient la Torah avec chaleur et dévouement, dans des conditions des plus hostiles, et n’ont pas vécu la Gueoula ?!
– Pouvons-nous imaginer, comme certains de nos frères l’ont présenté, que la Gueoula tant attendue se résumerait simplement à revenir nous installer en Erets Israël pour « y cultiver les oranges de Jaffa » en respectant de façon plus ou moins approximative (ou même « pas du tout » …) les Mitsvot de Hachem ?! Serait-ce là tout le sens de 2000 ans d’Histoire ?!
Rav Moché Ye’hiel Epstein (Beèr Moché p. 881) souligne que la « difficulté » de la Gueoula mentionnée par Rachi (30,3) ne peut pas se comprendre relativement au simple rassemblement des Juifs du monde entier ! Rassembler les Juifs éparpillés n’est évidemment pas le problème ! Où serait la « difficulté » pour Hachem ?!
Il ne peut s’agir que de la Gueoula spirituelle ! Amener chacun à son épanouissement spirituel complet, « sur mesure » selon l’identité profonde qui lui a été octroyée du début de la Création, là réside la « difficulté » réelle de la Gueoula !
Mais la Paracha ne commence pas avec les trois versets cités plus haut !
Elle débute avec (30, 1-2) : « …Et ce sera lorsque viendront sur toi toutes ces choses, la Berakha et la Kelala que J’ai placées devant toi ; et tu ramèneras à ton cœur parmi tous les peuples où Hachem ton Dieu t’a repoussé. Et tu reviendras jusqu’à Hachem ton Dieu, et tu écouteras Sa Voix, comme tout ce que je t’ordonne ce jour, toi et tes fils, de tout ton cœur et de toute ta personne ! ».
De plus, les versets de la Gueoula sont encore suivis de rappels de la Techouva successifs (30, 8 ; 30, 10). Toutefois, à notre époque où l’influence des « zélotes » de l’assimilation a conduit une partie importante de notre Peuple à s’éloigner de la Torah, il pourrait sembler que la Techouva se résume à revenir au simple respect concret des Mitsvot …
Rav ‘Haïm Zaïtchik (Or ‘Hadach, p.259) dénombre 4 mentions de la Techouva dans ce passage !
Il explique qu’il ne peut évidemment pas s’agir du même type de Techouva, du même niveau de prise de conscience et de cœur ! Ce sont en vérité des étapes successives.
A chaque étape, il y a une autre Techouva, plus élevée que la précédente, plus affinée, plus approfondie.
La Techouva se rapproche de plus en plus de Hachem et prend une dimension plus vaste.
Rav Zaïtchik cite Rav Its’hak Arama (Akédat Its’hak) qui cite les deux étapes du verset (Yechayahou 55, 7) : « Que le Racha abandonne son chemin … et qu’il revienne vers Hachem … ! ».
Rav Zaïtchik explique que c’est ce qu’exprime notre Paracha en alternant les versets de Techouva et les promesses de Gueoula par Hachem. Il s’agit d’une progression de niveau en niveau !
Rav Eliezer Kahn (Na’halat Eliezer, p.254) cite Sforno qui explique que les paroles : « Tu reviendras jusqu’à Hachem ton Dieu » signifie que ta Techouva consistera à agir exclusivement dans l’esprit d’accomplir la Volonté de ton Créateur … et non pas en tant que : « Mitsvat Anachim Meloumada » (par habitude) comme auparavant !
Rav Kahn souligne que c’était la remontrance du Navi (Prophète) Yechayahou à ses contemporains.
A quelle distance sommes-nous de ces sommets ?! Et pourtant, c’est ce que Hachem attend de chacun de nous !
Rav Moché Ye’hiel Epstein (Beér Moché, p.880) s’étonne : « Que veut dire écouter la « Voix » de Hachem dans le verset 2 ?! « . Il explique, en se basant sur la Michna (Avot 6, 2) : « Chaque jour une « Bat Kol » (une Voix Céleste, ou plus précisément un « Echo ») sort du Mont ‘Horev (Sinaï), qui s’écrie : « Malheur aux créatures de l’offense infligée à la Torah (par le fait de se dispenser de l’étudier) ! »
Rav Moché Ye’hiel Epstein rapporte les paroles du Baal Chem Tov qui demandait : « Si on n’entend pas cette Bat Kol, pourquoi sort-elle ?! « .
Et le Baal Chem Tov répondait que cette Bat Kol, est l’éveil de Techouva qui vient à chacun de nous, chaque jour.
Certains en tiennent compte et font Techouva, tandis que d’autres, insensés, n’y accordent aucune attention. C’est cette Bat Kol qu’il s’agit d’écouter, comme le recommande le verset : « l’écho de la « Voix » de Hachem au Har Sinaï lorsqu’Il nous a dit : « Anokhi Hachem Elokèkha » (Je suis Hachem ton Dieu !). C’est cet éveil qui doit amorcer, et réveiller de niveau en niveau notre mouvement de Techouva.
Rav Zaïdel Epstein (Héarot, p.90) s’étonne de l’expression (30, 4) : « Si ton « banni » est au bout du Ciel … ?! « . Le terme « au bout de la Terre » semblerait plus approprié !
Il répond que la Torah souligne ainsi un éloignement et une déchéance au-delà de toute dimension naturelle. Même à une telle « distance », Hachem nous rassemblera et nous reprendra !
Rav Epstein illustre cette notion par l’enseignement de nos ‘Hakhamim (Midrach Bamidbar Raba, 20, 22) que les Bené Israël ont mérité d’être délivrés d’Egypte grâce au fait de ne pas avoir changé leurs noms et leur langue.
Rav Epstein s’étonne de ce « mérite » apparemment insignifiant au sein de l’imprégnation de l’impureté profonde de l’Egypte dans laquelle ils étaient plongés.
Il répond que cet entêtement à conserver leurs noms différents des égyptiens malgré la pression sociale environnante manifestait la permanence d’un lien profond avec les générations passées, et de ce fait, avec Hachem.
Cette volonté, si légère soit-elle, suffit à justifier l’aide de Hachem pour « remonter » de l’abime de l’assimilation jusqu’au sommet du contact avec Hachem.
Rav Epstein illustre l’importance de conserver son nom en citant l’exemple de Yossef auquel Par’o avait attribué un nom égyptien : « Tsafnat Panéa’h » (Beréchit 41, 45).
Toutefois, Yossef, qui avait perçu que l’objectif de Par’o était de le rendre « égyptien », garda son nom Yossef, comme en témoigne la fin du verset : « et Yossef sortit sur le pays d’Egypte ».
Rav Epstein souligne ainsi que Yossef signa ses premiers décrets du nom de Yossef !
Et il rapporte l’exemple d’un grand Rav des générations récentes, qui débattait abondamment avec les Maskilim (les Juifs assimilés à la société ambiante).
On lui demanda pourquoi il insistait tellement sur le fait de conserver la barbe, ce qui n’était qu’un « surplus » sur la Torah, pour des gens qui transgressaient toutes les interdictions les plus graves.
Il répondit que tant que la barbe est présente, le « porc » ne rentrera pas si facilement. La barbe autour de la bouche rappelle à l’homme qu’il est encore Juif !
De même, en Egypte, le nom et la langue montraient qu’il restait en leur intériorité un lien et une volonté d’attachement à Hachem, même s’ils avaient atteint les derniers niveaux de Toum’a (Impureté).
Même de là, « Hachem te rassemblera et te prendra » !
Chaque année, nous lisons la Paracha Nitsavim au seuil de Roch Hachana.
Que cette lecture nous aide à prendre le chemin de la Techouva, à quelque niveau que nous nous trouvions, jusqu’à atteindre « jusqu’à Hachem ».
שבת שלום !