Parasha – 02 CHEMITA 5782

Chabat de l’homme… Chabat de la terre…

Nous sommes au début du mois d’Elloul, à moins d’un mois de Roch Hachana, le début d’une nouvelle année de Chemita. La Mitsva de Chemita consiste en un arrêt de toute activité agricole en Erets Israël, la Terre “que Hachem nous donne” (Vayikra 25,2) pendant une année entière, tous les sept ans. 

Nous ne pouvons pas rester sans nous associer à cette Mitsva grandiose, qui concerne chaque Juif au plus profond de son être.

La Paracha Behar, avant-dernière Paracha du Séfer Vayikra, développe la Mitsva de la Chemita. Dans les Divré Torah sur la Paracha Behar des années précédentes (disponibles sur demande à kvlhm.ezr@gmail.com), nous avions rapporté les paroles de nos ‘Hakhamim qui soulignent le lien entre la Chemita et le Chabat. Le verset (Vayikra 25, 1) annonce la Mitsva de Chemita en faisant référence au Har Sinaï, où Hachem nous a donné la Torah.

La Torah nous présente la Chemita par les termes : “La terre cessera (du terme “Chabat”) un Chabat pour Hachem” (Vayikra 25,2) ! Il ne s’agit certainement pas de “jachère” comme c’est le cas partout au sein du monde agricole.

Au contraire, à la différence des pays où les terres doivent se reposer une année sur deux ou sur trois pour ne pas épuiser les ressources du sol, en Erets Israël, la Berakha de Hachem permet de produire sans interruption pendant toutes les années intermédiaires.

De même que chaque semaine le Chabat nous rappelle que le monde ne nous “appartient” pas, mais qu’il nous est accordé en cadeau permanent par Hachem, nous devons respecter le Chabat de la Terre. Il est important de souligner que le verbe “Chavot” racine commune du Chabat et de la Chemita n’a nullement une connotation de repos, mais “d’arrêt”.

Ce n’est pas la fatigue, ni de l’homme, ni de la Terre qui est en cause !

C’est le rappel de la souveraineté de Hachem que nous manifestons en nous retirant de toute intervention sur la Création !

L’importance de cette Mitsva est tellement élevée que la Torah l’utilise ici comme référence pour souligner que toutes les autres Mitsvot ont été données dans toutes leurs dimensions jusqu’aux moindres détails au Sinaï (Rachi 25, 1).

De plus, la Mitsva de la Chemita est citée dans la Tokha’ha (Remontrance) de la Paracha Be’houkotaï (Vayikra 26, 34) comme étant la raison de la Galout (l’exil) : “Alors la Terre recevra ses Chabatot (les années de Chemita), tout le temps de sa désolation, alors que vous serez dans le pays de vos ennemis ; alors la terre cessera, et recevra ses Chabatot (les années de Chemita) !”

À nouveau, nous constatons qu’il ne s’agit évidemment pas de “repos” matériel, puisque les ennemis qui nous remplaceront n’auront pas à cœur de laisser la Terre en jachère. C’est notre “abus” sur un monde qui ne nous appartient pas qui est sanctionné par la Chemita. Nous avons perdu la conscience de notre Créateur !

La Michna Avot dit : “la Galout vient dans le monde pour la faute d’idolâtrie, d’immoralité, de meurtre, et pour la Chemita de la Terre” (5, 11).

Rav Chalom Noa’h Bérézovski (Netivot Chalom, Vayikra, p.117) s’étonne de la place de la Chemita aux côtés des trois fautes les plus graves ?!

Il répond en citant la première Michna dans Avot : “Moché a reçu la Torah du Sinaï…”. Mais, ce n’est pas du Sinaï que Moché Rabénou a reçu la Torah, mais de Hachem !

Rav Bérézovski explique qu’il s’agit ici de la manifestation spectaculaire qui a introduit Matane Torah. C’était la base de la réception de la Torah dans le sens où le fondement de toute la Torah et des Mitsvot est la Emouna.

C’est le premier des Asséret HaDibrot (les Dix Commandements) : “Je suis Hachem ton Dieu !”. C’est-à-dire Celui Qui, de même qu’Il a rompu les lois de la nature pour te sortir d’Egypte, ainsi, Il gère tout ton quotidien !

Tout repose donc sur la Emouna.

Toutefois le Netivot Chalom, explique qu’il y a trois niveaux de Emouna :

– la Emouna du cerveau, lorsque l’homme comprend intellectuellement la place de Hachem le Créateur et Maître du Monde à chaque instant.

– la Emouna du cœur qui ressent la Emouna.

– et au-dessus de tout, se trouve la “Emouna des organes”, lorsque tout le corps vibre de Emouna, et qu’il ressent qu’il n’y a rien en dehors de Hachem.

Pour illustrer une notion aussidifficile à percevoir, représentons-nous notre état face à un danger tel que toute préoccupation autre s’efface totalement, le corps paralysé par ce sentiment… C’est cette “Emouna des organes” que nous avons acquise au seuil de Matane Torah.

Et c’est ce but-là qui doit être l’objectif de chacun dans l’accomplissement des Mitsvot et dans l’étude de la Torah.

Rav Bérézovski rapporte le verset des Tehilim : “Toutes Tes Mitsvot sont Emouna” (119, 86) ; la Nechama de toute la Torah et des Mitsvot est la Emouna. Toutefois chaque Mitsva particulière possède sa dimension spécifique.

La particularité de la Chemita est d’être le sommet de la Emouna, la “Emouna des organes”. Le Juif abandonne une année entière son champ qui est la source de sa subsistance et celle de sa famille.

Les ‘Hakhamim (Midrach Vayikra Rabah, 1, 1) appliquent à cet exploit le verset des Tehilim (103, 20) : Les Héros forts, qui accomplissent Sa Parole… !”. Il ne s’agit pas d’un effort ponctuel, limité dans le temps, mais de conserver sa sérénité pendant une année entière en l’absence de tout support logique de subsistance pour les siens et de voir son champ, œuvre de ses propres mains, à l’abandon.

Il n’est pas question d’une démarche “suicidaire” d’abnégation pour obéir à Hachem ! Il faut vivre l’année de Chemita dans la grandeur !

Rav Its’hak Ayzik Scherr (Léket Si’hot Moussar, p. 276), souligne que l’année de la Chemita consiste en un Chabat qui dure un an, pendant lequel tout le Peuple de Hachem vit l’atmosphère particulière du Chabat, les vêtements de Chabat et le rayonnement du visage de Chabat !

Un an à la Table de Hachem !

Chaque être humain a la possibilité d’accomplir des actions qu’il considèrera comme obligatoires pour quelque raison. Mais seul Israël est à même d’un contact aussi profond avec Hachem.

Notre monde actuel étant, hélas ! davantage centré sur l’industrie ou l’informatique que sur l’agriculture (oubliant que nous ne pouvons pas nous nourrir de “micro-processeurs”…), il n’est pas propice à la prise de conscience de la Chemita par chacun de nous.

Une partie de notre Peuple réside en ‘Houts Laarèts (en dehors d’Erets Israël), et n’a pas l’occasion de ressentir même les lois relatives à la consommation des fruits qui poussent pendant la Chemita sans soins et qui sont régis pendant la Chemita par des règles très précises.

Pour cette partie de nos frères, la Chemita n’est qu’une Mitsva “historique” dont on ne perçoit nullement l’actualité !

Mais même pour ceux qui ont le privilège d’habiter en Erets Israël et de gouter un peu à l’atmosphère de la Chemita, c’est essentiellement dans les “contraintes” de l’approvisionnement que se concrétise principalement le ressenti de cette Mitsva.

Quel dommage que cette “infirmité” du monde “moderne”, indépendante de notre volonté, nous tienne à l’écart de cette source merveilleuse de Emouna et de lien naturel avec Hachem qu’est la Chemita !

Nos ‘Hakhamim des dernières générations ont “lutté” de toutes leurs forces pour “réactualiser” la pratique de la Chemita dès les premières vagues de Alya constituées de Juifs authentiques qui voulaient faire revivre réellement Erets Israël dans sa splendeur, et nous préparer ainsi à un retour vrai de la Galout.

Toutefois, pour soutenir les pionniers qui étaient l’avant-garde de tout Israël, et simultanément associer ceux qui n’avaient pas un accès direct à la Mitsva, les ‘Hakhamim ont mis en place une caisse de solidarité collective de notre Peuple, destinée à aider nos “éclaireurs” dévoués.

Les mêmes représentants des Rabbanim qui vérifient les besoins de soutien (pour faire face aux dépenses d’équipement qui courent dans les entreprises agricoles sans rentrées pour les couvrir, et pouvoir passer la période difficile due aux conditions modernes …) consacrent leurs efforts à convaincre toujours plus de nos frères de s’ajouter aux rangs des Héros de notre Peuple qui respectent concrètement les lois de la Chemita.

Hodou l’Hachem ki Tov… de Chemita en Chemita, en Erets Israël, le nombre des pionniers de la Chemita s’accroit, laïcs… eh oui !!! traditionalistes… pratiquants… qui forment tous ensemble une formidable “manifestation” de Emouna.

Le Midrach (Eykha Rabah, Peti’ha, 2) Rapporte que Rabbi Yehouda Nessia (petit-fils de Rabénou HaKadoch) envoya deux ‘Hakhamim améliorer la situation spirituelle des agglomérations en Erets Israël.

Lorsqu’ils arrivaient dans une agglomération, ils demandaient : “Amenez-nous les gardiens de la ville !”. On leur amenait alors les vigiles.

Les ‘Hakhamim disaient alors aux citadins : “ceux-ci ne sont pas les “gardiens de la ville ! ce sont les destructeurs de la ville ! (Car si vous mettez toute votre confiance dans ces gardiens, certainement Hachem abandonnera la ville à la destruction…).

Les habitants leur demandaient alors : “et qui sont donc les gardiens de la ville ?!” Les ‘Hakhamim leur répondaient ; “ce sont les enseignants de la Torah et de la Michna, qui s’occupent et enseignent, et gardent la Torah jour et nuit !… Comme il est dit (Tehilim 127,1) : “Si Hachem ne construit pas une maison, … et si Hachem ne garde pas une ville …”. De même, face à la Galout due au manque de Emouna manifesté par la négligence de la Chemita, nous pouvons comprendre que notre avenir en Erets Israël dépend du respect renouvelé de cette Mitsva magnifique !

Dans la mesure où nous ne possédons pas de terrain où pratiquer concrètement cette Mitsva, il nous reste possible de nous y associer au moyen d’une participation financière symbolique. C’est peu, mais si nous le faisons en essayant de “porter nos vêtements de Chabat” à travers cette petite action, nous pouvons espérer l’aide de Hachem pour que bientôt, très vite, Hachem nous redonne à tous ce mérite que nous avons perdu par la Galout !

Que Hachem nous ramène bien vite à Lui dans Sa Maison, Erets Israël, revenue à sa grandeur d’antan !

vous aussi, associez vous à cette grande Mitsva :
Kéren Hacheviit : https://keren7.com

Rav Eliezer RISSMAK     Yechiva OHALE YAACOV    
Tel  France : 01 77 47 24 71   Israel : 05 33 12 24 36