LE RABBI DE KALOV – 163 – Soukot – 5786

La fête de Soukot avec l’Admour de Kalov

Rabbi Ouri de Sterlisk zatsal habitait après son mariage dans une cave étroite dans la ville de Lamberg, et son épouse se consacrait à la vente de légumes. Elle gagnait une somme modique qui lui permettait d’acheter du pain sec, mais personne n’était au courant de l’état de pauvreté qui régnait dans la maison de ce Tsadik, car aucune inquiétude ne transparaissait sur son visage.
À la naissance de son fils Chlomo zatsal, le Rav offrit l’honneur d’être Sandak (parrain) au noble ‘hassid, Rav Leib de Meless zal, beau-frère du Rabbi, le ‘Hozé de Lublin. La Brit Mila se déroula au Beth Hamidrach, non loin de leur lieu de résidence, et à l’issue de la circoncision, le Sandak, le Mohel (circonciseur) et les proches du Rav se rendirent chez lui pour participer au repas de Mitsva.
Lorsqu’ils arrivèrent chez lui et virent l’état de pauvreté qui y régnait, ils furent très choqués, car ils n’étaient pas au courant jusque-là de l’étroitesse dans laquelle vivait cet homme saint. Ils préparèrent immédiatement un repas digne de ce nom. 
Le lendemain de la Brit Mila, Rabbi Leib de Meless rencontra le tsadik au Beth Hamidrach et lui demanda comment il gagnait sa vie. Il lui répondit en yiddish : « J’ai deux Ki « . Le Rabbi comprit qu’il possédait deux vaches nourricières grâce auxquelles il gagnait sa vie en vendant le lait, et il demanda aux membres de sa famille d’acheter du lait chez Rabbi Ouri. Mais ils furent très étonnés lorsqu’ils se présentèrent pour acheter du lait chez Rabbi Ouri, et son épouse répondit qu’ils n’avaient jamais possédé de vache, et n’avaient pas une goutte de lait à la maison.
Rabbi Leib exprima sa stupéfaction à Rabbi Ouri, qui lui répondit : « J’ai dit que j’avais deux ‘Ki » (en hébreu, cela ressemble au terme de Ki, qui signifie vache en yiddish), et cela correspond aux deux « Ki » énoncés par le roi David dans les Téhilim (33,21) : » Ki vo yisma’h libénou, ki vechem kodcho vata’hnou, Oui, notre cœur se réjouit en Lui, oui, nous avons confiance en Son saint nom  » : c’est de Lui que je gagne ma vie et obtiens ma vitalité. 
Nous apprenons de ce récit que la joie et le Bita’hon, la confiance en Hachem, sont interdépendants. En effet le Bita’hon entraîne l’homme à vivre dans la joie, du fait qu’il est nourri par Hachem, porté par Ses épaules et ne se fait aucun souci. Il est intimement convaincu que rien de mal ne peut advenir du Ciel et que tout ce que Hachem fait est pour le bien, et il est ainsi le plus heureux des hommes. Il fait rayonner une lumière de joie et de sérénité à tout son entourage, il mène une belle vie authentique, car la Émouna fait revivre l’homme, comme l’indique ce passage des Écritures (‘Habakouk ,4) : « Le juste vivra par sa ferme Émouna. »
À ce sujet, on raconte que les frères pieux, Rabbi Shmelke de Nikolsbourg zatsal et son frère, l’auteur du Baal Haaflaa zatsal, à leur première visite chez le Maguid de Mezeritch zatsal, lui demandèrent de clarifier ce passage de nos Sages (Brakhot 54a) : « L’homme est tenu de réciter une bénédiction lorsqu’il subit un malheur tout comme lorsqu’il bénit pour un bienfait » : en réalité, il faudrait expliquer comment il est possible de parvenir au niveau de se réjouir du mal tout comme on se réjouit du bien. Le Maguid leur suggéra de se rendre au domicile de son élève, Rabbi Zoucha d’Anipoli zatsal, qui serait en mesure de le leur enseigner.
Arrivés au domicile de Rabbi Zoucha, ils remarquèrent qu’il vivait dans un dénuement extrême. Lorsqu’ils lui expliquèrent la raison de leur venue, il leur répondit : « Je ne peux pas vous l’enseigner, car je n’ai jamais senti, de ma vie, de mal, mais j’ai toujours vu des bienfaits et des bontés de Hachem, loué soit-Il. De ce fait, vous devez vous rendre chez un homme qui a vécu un malheur qui s’en est réjoui et il vous l’enseignera. » 
Par cette réponse, ils comprirent parfaitement ce texte de nos Sages, en constatant qu’il était possible d’accéder à ce niveau de ne considérer aucun événement comme un mal, et d’accepter tous les événements dans la joie. 
De même, Rabbi Bounam de Psishis’ha zatsal interprétait ainsi cette Michna : « De pain et de sel tu te nourriras » (Avot 6,4) : même si tu n’as que du pain et du sel à manger, mange-le dans la joie, et « de l’eau avec mesure tu boiras » : même si tu n’as que de l’eau en quantité limitée, malgré tout, bois-en comme si tu en avais en grande quantité, « une existence de peine tu vivras », mais tu vivras une vie pleine de vitalité et de joie, car même avec le peu que l’on a, il faut vivre dignement, et ne pas sombrer dans la dépression et le désespoir, mais se renforcer en se disant que cela est aussi pour le bien. 
Il y a environ soixante-dix ans, il régnait en Erets Israël une période de pauvreté et de restriction. Les résidents d’Erets Israël vivaient dans un grand dénuement et souffraient d’une pénurie de produits de base. À cette époque, je me rendis en terre sainte pour étudier à la yéchiva de Belz, et sur le bateau que je pris pour m’y rendre, je rencontrais l’Admour de Moditz zatsal, Rabbi Chemouël Eliyahou. Il me fit part d’un Dvar Torah qui renforce beaucoup dans les situations difficiles. Voici ce qu’il me dit : 
« Les maladies et les souffrances s’abattent sur l’homme du Ciel pour deux raisons : chez les non-Juifs, c’est une forme de vengeance pour leur conduite, et chez les Juifs, elles émanent d’un amour, pour en dégager un bienfait. Tel est le sens de ce verset (Chemot 15,26) : « les plaies dont J’ai frappé l’Égypte », les plaies qui sont une forme de vengeance, ce genre de fléau, « ne t’atteindra pas » Pourquoi ? « Car Moi, l’Éternel, Je te guérirai. »Je ne fais que guérir et prodiguer du bien au peuple juif, et de ce fait, si tu constates une maladie au sein du peuple juif, sache que la maladie même est une guérison, pour purifier l’âme de ses fautes. 
Dans ces circonstances, il nous incombe de retenir les propos de nos Sages figurant à la fin du traité Sotah, qui évoquent la pauvreté et les autres adversités qui auront cours à la période précédant la venue du Machia’h : « Sur qui devons-nous nous appuyer ? » Sur notre Père au Ciel. En d’autres termes, notre rôle principal consiste en cette période à renforcer notre Émouna et à nous appuyer sur notre Père au Ciel qui a pitié de nous et agit uniquement pour notre bien. » 
C’est le sens de cet écrit (Dévarim 16,16) : « Et tu seras seulement joyeux » dit à propos de la fête de Soukot, « le temps de notre joie », propice pour se renforcer dans la vertu de la joie : « Et tu seras seulement » : même lorsque tu es dans la dimension du « seulement », qui est un langage de privation, comme l’indique la Guémara (Sanhédrin 49a), lorsqu’il te manquera de la Parnassa, etc., malgré tout, tu seras joyeux. 
À ce sujet, nos Maîtres ont dit (Souka 48a) : « Tu seras seulement joyeux », signifie que l’on doit inclure dans la joie également le dernier jour de fête » : même à la dernière période du sombre exil, qui ressemble à la nuit, sois également joyeux, car c’est en réalité un jour de fête, car tout est pour le bien.
‘Hag saméah, Chabbat Chalom !

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