Le “Mot du Jour” 9 Elloul 5781 – 17 août 2021

NE L’OUBLIONS PAS !…

IL est une personne à qui l’on oublie trop souvent de demander pardon, un pardon sincère et vrai, de tout notre cœur. C’est notre conjoint*.

Nous nous voyons tous les jours. Chaque jour il s’attache à nous procurer le meilleur. Il travaille pour nous, amène la Parnassa, le « de quoi vivre » à la maison. Notre conjoint -qu’il soit notre mari ou notre épouse- fait les courses, les repas, s’occupe des enfants avec amour, nous procure notre équilibre, nous écoute lorsque nous avons des ennuis, sommes inquiets ou en dilemme. Il est là, toujours ou presque toujours, disponible, malgré sa propre fatigue et les soucis qu’il met de côté lorsque ce n’est pas le moment de les exposer. C’est vrai que c’est une femme et pas un homme comme moi, ou inversement. Et que de ce fait il nous arrive de ne pas parler la même langue -ou plus exactement d’user des mêmes mots mais en leur attribuant des sens différents- et de ne pas voir et saisir les situations de la même manière (voir John Gray « Les hommes viennent de Mars, les Femmes viennent de Vénus »). Est-ce l’effet de l’habitude et de la routine qui nous conduit parfois à ne pas lui accorder tous les égards qui lui sont dus ? Le valorisons-nous comme nous le devrions ? Ne sommes-nous pas quelquefois un peu légers envers lui ? Peut-être même le considérons-nous inférieur à nous et de ce fait manquons-nous du respect que nous lui devons ? Le hasard n’existant pas, on ne se trouve donc pas par hasard marié avec lui / avec elle. Tout s’inscrit dans un plan géré, organisé par Hashem. Ce n’est pas pour rien que la femme et l’homme sont complémentaires entre eux. Elle lui apporte ce qu’il lui manque et inversement. Et ce qui lui manque c’est tout. L’être humain n’a-t-il pas beaucoup plus tendance à voir ce qu’il lui manque plutôt que ce qu’il a déjà ? Ce dont il a un besoin vital, c’est bien sûr l’équilibre, la sécurité, la douceur, la paix intérieure. Et si je ne les ressens pas, il faut que je me travaille, que je me scrute, que je m’adapte, que j’ajuste mes critères et ma compréhension. En accomplissant ce travail de mise à niveau, je deviens meilleur. Chemin faisant, je m’élève et je suis mieux à même de lui apporter ce dont mon conjoint a besoin. Je me transforme de receveur en donneur. Au lieu d’attendre en retour, je veille à lui procurer ce qu’il lui faut. Non pas selon mes propres critères, mais bien selon les siens. De la joie de se voir, de se regarder, l’homme et la femme en viendront à diriger ensemble leur regard dans la même direction. Mais pour cela il me faut l’accepter sans réserve. Je vis aussi pour lui. Je construis mon projet de vie avec lui et j’assume autant que je peux sans aucun calcul. Mes capacités sont plus grandes que les siennes ? Je ne peux que remercier Hashem du don qu’Il me fait ! Si je comble son manque, non seulement je justifie le don d’énergie qui m’est octroyé, mais en plus je soutiens mon conjoint. Je participe à le soulager. De nouvelles énergies peuvent naître qui, avec l’aide du Ciel, ne pourront produire que des effets bénéfiques et pas le contraire. Alors demandons et obtenons son pardon pour toutes les souffrances, petites ou grandes, physiques ou morales, que nous lui avons occasionnées. Elle est la personne la plus précieuse. Nous lui devons tant ! N’oublions jamais que c’est elle qui a porté nos enfants, les a nourrit et en a pris soin en permanence, jour et nuit (à conjuguer aussi au présent, comme au futur, selon les situations). Si nous ne l’avons pas constamment à l’esprit, travaillons-nous, corrigeons-nous, réparons-nous ! C’est grâce à la présence de notre conjoint à nos côtés que nous pouvons comprendre ce qu’il nous faut mettre en œuvre et le réaliser. Il est le catalyseur qui nous motive, nous donne l’impulsion et la clarté de jugement. Et même si apparemment nous ressentons parfois comme un frein, il est forcément bénéfique, car il réveille en nous de nouvelles énergies. Cette prise de conscience et tout ce qui va en résulter, vont nous faire grandir et nous dépasser. Elle est, avec les enfants, les plus beaux fruits de l’union de l’homme et de la femme qui s’épanouissent dans leur complémentarité. Le but de la Création dans l’existence de ce couple est réalisé. L’homme et la femme ont accueilli la Hashga’ha Pratite, la Providence, qui les a spécialement servi et soutenu en leur faisant le plus beau cadeau de leur vie.

Si le pardon demandé et obtenu réciproquement concourt à cet épanouissement, cela vaut la peine, non ?

Certainement, mais ce n’est pas tout ! Car ce pardon peut aussi déterminer celui que Hashem va leur accorder à Yom Kippour, le jour du Grand Pardon !

Ce jour là, tous le savent, il nous faut impérativement recevoir le pardon de Hashem pour toutes les fautes que nous aurions commises envers Lui. Mais, par ailleurs, il nous faut aussi impérativement recevoir le pardon de tous ceux envers qui nous aurions eu quelque manquement que ce soit (voir « Accorder et obtenir le Pardon » dans la « Lettre de Dvar Torah n°25 » sur www.dvartorah.org).


Quelques anecdotes viennent à l’esprit.
Du temps de la Guemara, un couple qui au bout de dix ans de mariage n’avait toujours pas eu d’enfant a décidé de se déparer. Ils sont allés l’annoncer à Rabbi Shimone Bar Yo’haï, qui avait célébré leur union et qui leur dit : « De même que vous avez fait un festin lorsque vous vous êtes mariés, puisque la seule raison pour laquelle vous voulez vous séparer est parce que vous n’avez pas eu d’enfant, faites également un festin avant votre séparation ». Au cours du repas, l’homme dit à sa femme : « Prends ce que tu as de plus précieux de la maison, et emporte-le avec toi ! » La femme dit au serviteur de remplir de vin la coupe de son mari. Le mari but ainsi plusieurs coupes et s’endormit. Il se réveilla le lendemain dans la maison des parents de sa femme. Il demanda ce qu’il faisait là. Sa femme lui dit : « Tu m’as dit de prendre avec moi ce que j’avais de plus précieux, alors j’ai demandé qu’on t’emmène ici avec moi ». À l’époque on festoyait en étant allongés sur des canapés de sorte qu’il était aisé d’être transporté. Le couple est alors retourné voir Rabbi Shimone Bar Yo’haï qui a été tellement ému par cette histoire qu’il bénit le couple. L’année suivante, il eurent un enfant, en dépit de ce qui avait été décrété dans le Ciel. Comme Hashem peut décider de permettre d’enfanter malgré tous les obstacles, un Tsadik le peut aussi par ses bénédictions. « Tsadik Gozère VehaKadosh Baroukh Hou Mekayem ». Ce que le Tsadik décrète, le Ciel l’accomplit ! (histoire racontée par Rav Yossef David Frankforter shlita, à partir du Midrash Shir HaShirim Rabba 1, sur le 4ème verset).

Puis, beaucoup plus proche de nous, puisque ce qui suit s’est passé au siècle dernier :

Rav Yaakov Yossef Hermann zatsal, surnommé le ‘Hafets ‘Hayim d’Amérique, dans « Le Patron avant tout » (traduit de l’anglais : « All for the Boss ») s’était engagé avec sa femme à ne jamais prendre congé l’un de l’autre pour la nuit avant d’avoir aplani toute trace de désaccord ou de quelque ressentiment que ce soit qui aurait pu naître entre eux durant la journée.

Rav Arieh Lévine zatsal, dans « Le Tsadik de Jérusalem » supplia sa femme après qu’un invité -qu’ils avaient accueilli chez eux et hébergé pour la nuit- avait quitté leur foyer à leur insu en emportant toute l’argenterie, de ne jamais refuser à cause de cela l’hospitalité à quiconque en avait besoin. De même, lorsque sa femme souffrit d’un pied, le Rav et la Rabbanith sont allés consulter. Le Rav dit au médecin : « Nous avons mal au pied ». Ils étaient si proches l’un de l’autre qu’il ne faisaient plus qu’une seule entité. « Haoève Ishto KeGoufo OuMekhabda Yotère MeGoufo… » Aimer sa femme comme lui-même et l’honorer plus que lui-même… (traité Yevamott 62b).

Rav Shlomo Zalman Auerbach zatsal, Rosh Yeshivath Kol Torah à Jérusalem, fit l’éloge de sa femme lors de son enterrement en soulignant combien elle avait été merveilleuse durant toute sa vie et qu’il ne se rappelait pas avoir commis le moindre impair envers elle, de sorte qu’il n’avait pas à lui demander pardon sur quoi que ce soit.

Que Hashem nous donne à tous la force de nous en inspirer !

Et que les Sli’hoth, prières de repentance, du mois de Elloul, suivies de Rosh HaShana et de Yom Kippour, apportent à chacun le pardon et de Hashem et de tous ceux desquels nous devons le demander, l’obtenir et l’accorder. Que nous ayons tous une Ktiva Ve’Hatima Tova, que nous soyons tous bien inscrits dans le Grand Livre de la vie ! Amen.

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* Bien évidemment, ceux qui sont encore seuls et qui voudraient que Hashem leur fasse rencontrer leur Zivoug, leur âme sœur, pour fonder leur foyer, que Hashem entende leurs prières et réponde à leur attente !

Quant à ceux qui ont perdu leur conjoint, à D.ieu ne plaise, que Hashem leur apporte la consolation et la force de surmonter leur peine. Qu’ils aient à l’esprit que le Maître du Monde ne souhaite pas qu’ils soient tristes plus que nécessaire (voir « Shekhina et Kedousha dans la « Lettre de Dvar Torah n°25 »). La vie continue et elle peut parfois aussi se poursuivre dans une nouvelle union heureuse « KeDath Moshé VeIsraël », selon la Loi de Moïse et d’Israël. Que ceux qui le souhaitent vraiment puissent être comblés dans les meilleurs termes !

Le même vœu s’adresse à tous ceux qui auraient été exposés à une incompatibilité dans leur couple qui les aurait conduit à rompre leur mariage. Le Guett, le divorce, n’est pas seulement prévu par la Torah, mais c’est une Mitzva de divorcer lorsque les circonstances l’exigent. Temps douloureux s’il en est, tant pour l’homme que pour la femme et aussi, hélas, pour les enfants, s’il y en a, qui doivent absolument être protégés. Au point que même l’Autel du Temple, pleure sur la rupture de la 1ère union d’un mariage juif (Traité Guittin 90b). Le divorce n’est donc à envisager qu’en dernier recours et il faut absolument tout faire pour l’éviter si cela est possible. Rappelons-nous que l’union a été sacralisée devant témoins, matérialisée par la bague et la Ketouba, le contrat de mariage. Aussi, tant que le Guett, l’acte de rupture du contrat de mariage, n’a pas été remis à la femme, aucune nouvelle union ne peut être ni envisagée ni contractée de part et d’autre. Une autorité rabbinique saura aider et conseiller pour préserver la sainteté, la pureté et l’harmonie du couple. Hélas aussi s’il devait se séparer. Mais c’est là déjà un autre sujet, bien trop personnel pour être exposé.