Le “Mot du Jour” 22 Adar 5780 – 18 mars. 2020

 Pour la Refoua Sheléma de Rav ‘HAMOU shlita, Messod ben Esther

« Les Religieux ne respecteraient pas les directives sanitaires ? » interdisant les regroupements de plus de dix personnes. Voilà un leitmotiv bien curieux. Il dérange quant à l’étiquetage, l’amalgame, voire le rejet sous-jacent à l’égard de cette partie de la population.

S’il y a eu des cas où dans quelques Yeshivoth les Bakhourim, les étudiants, ont eu du mal à se répartir en petits groupes pour continuer leur étude, on ne peut en aucun cas affirmer que l’ensemble de la communauté religieuse d’Israël est récalcitrante à suivre des directives visant à préserver la vie. Une preuve parmi d’autres : de très nombreux mariages ont été célébrés, et le sont encore, dans des appartements privés, en très petits comités, désertant les salles de mariage habituelles -conçues pour accueillir des centaines de personnes- précisément pour se conformer aux directives de salubrité.

Si des Bakhourim ont eu du mal à se séparer en petits groupes, c’est parce que la vitalité dégagée par le groupe en étude est stimulante, voire impérieuse pour leur étude qui signifie pour eux toute la vie, toute leur raison d’être.

Malgré l’édit des Romains interdisant l’enseignement de la Torah sous peine de mort, d’éminents Rabbanim ont préféré continuer à enseigner, risquant ainsi leur vie. On se souvient de la mort tragique de Rabbi Akiva avec celle des Dix Arougueï Malkhouth, les dix suppliciés au nom de l’édit du Roi (du pouvoir). Tout le monde connaît la parabole du renard s’adressant aux poissons nageant dans la rivière : « Mes frères, rejoignez-moi sur la berge, vous serez à l’abri des filets des pêcheurs ». Et les poissons de répondre : « Mais l’eau est notre vie, et nous préférons y rester plutôt que de finir dans votre ventre ». La Torah est comparée à l’eau, indispensable au maintient de la vie.

Les restrictions sanitaires imposées l’ont été de façon graduelle, au fur et à mesure de la prise de conscience des dangers encourus du fait des risques de la propagation de l’épidémie. D’abord 100 personnes, puis 50 personnes, puis 10 personnes seulement ont été autorisées à se réunir en un lieu.

Certaines Yeshivoth avaient-elles besoin juste d’un peu plus de temps pour prendre la mesure et appliquer ces restrictions ? On peut bien l’imaginer concernant un lieu où l’on est complètement investi dans l’étude de la Torah.

Qu’on ne fasse pas d’amalgame, ni d’étiquetage. Ils portent atteinte à l’unité d’Israël !

Or l’unité d’Israël dépend fondamentalement d’un principe de solidarité et de responsabilité qui se dit en hébreu « KOL ISRAEL ARÉVIM ZÉ LAZÉ ». Cela signifie que tout Israël est responsable et garant pour chacun d’entre nous. L’ensemble du peuple est jugé pour ce qu’il fait à titre collectif et à titre individuel.

Pour rappel, lorsque nos Pères ont reçu et accepté la Torah au Mont Sinaï ils se sont engagés à l’accomplir pour eux-mêmes et au nom des générations futures, donc en notre nom aussi, en déclarant « Naassé VeNishma ». Ce qui signifie : nous ferons et nous comprendrons. Nos sages expliquent que c’est en accomplissant, qu’il est donné à chacun de pouvoir comprendre. Il n’en reste pas moins que tout le peuple s’est alors engagé pour nous. Or cet engagement est le fondement qui nous légitime pour bénéficier de la promesse faite par D.ieu au Patriarche Avraham de nous attribuer la Terre d’Israël. Pas dans le cas contraire. En d’autres termes, si nous ne respections pas l’engagement de nos Pères, la Terre d’Israël ne nous reviendrait pas. De plus, ce n’est que si nous agissons en conformité avec les préceptes de la Torah que nous sommes jugés favorablement et bénéficions de toutes les faveurs et protections. A contrario, si nous agissons sans respecter les préceptes de la Torah, nous ne pourrons pas prétendre jouir des bienfaits, de la sollicitude et de la protection du Ciel.

Dès lors, tous ceux qui se placent hors du champ du respect des Mitzvoth agissent au détriment de l’intégrité du Peuple Juif et de l’ensemble de l’humanité, de leur bien être et de la protection qui leur reviennent lorsque les Mitzvoth sont effectivement observées et respectées. Alors ils agissent à la manière du passager d’un bateau qui commence à creuser un trou dans la coque sous son siège. Les autres passagers s’insurgent et lui crient : « Mais tu vas faire couler le bateau ! ». L’autre de rétorquer : « Mais j’ai payé ma place ! ». Même s’il était tout seul il faudrait l’empêcher de se suicider. Combien de fois plus faudrait-il intervenir pour l’empêcher de mettre l’ensemble de la communauté en péril ! C’est pourtant ce qu’il fait lorsqu’il ne respecte pas les préceptes de la Torah, lorsqu’il enfreint le Shabbath, lorsqu’il ne mange pas Kasher, lorsqu’il ne respecte pas les règles de pureté familiale, lorsqu’il vole, lorsqu’il ment, lorsqu’il convoite le bien d’autrui, lorsqu’il lui cause un préjudice, lorsqu’il ne respecte pas ses parents, etc…

Et oui, nous sommes bien garants et responsables les uns des autres.

Et ceux qui refusent cette réalité s’insurgent en criant : « Mais c’est de la contrainte et de la coercition religieuse ! ». Soyons juste honnêtes : une acceptation de plein gré de la Torah et de ses préceptes, confirmée à Pourim, peut-elle être assimilée à une contrainte ?  « Mais on ne m’a pas consulté, je n’ai pas donné mon accord, moi ! »

Mais nos Pères se sont engagés pour eux-mêmes et pour toutes les générations à venir, dont nous faisons partie. C’est à cette condition que la Torah nous a été donnée et que nous avons été sauvés. « Mais je suis libre d’accepter ou pas ! ». Faux ! Car si c’était le cas, nous serions ici hors du Judaïsme, hors du Peuple Juif, qui est uni et lié et par un engagement et par une responsabilité collective envers tous ses membres. Le Judaïsme ne se réduit pas une religion. C’est toute la vie, conduite par les préceptes de la Torah, son étude, la pratique des Mitzvoth, autant celles en relation avec le Ciel, que celles en relation avec les Hommes entre eux. Tous les instants de la vie d’un Juif observant et réalisant ce qui lui est demandé sont inclus dans le judaïsme, sont le judaïsme. Cela dépasse les limites de la religion. Tout ce qui est en dehors lui est étranger.

On ne peut nier les influences extérieures, mais elles ne doivent jamais empiéter sur nos obligations et nous permettre de vivre en Juif.

Certes, il en est qui ont tellement été imprégnés de valeurs extérieures, au point que d’aucuns ont pu ignorer qu’ils étaient juifs -parce qu’ils sont nés d’une mère juive- sans avoir reçu la moindre éducation juive. Des erreurs ont été commises. Elles ne peuvent se perpétuer très longtemps car les personnes en cause risquent de quitter le judaïsme, parfois sans s’en apercevoir. Mais avant d’en arriver là, à D.ieu ne plaise, à eux de rechercher tout ce que cela implique, ce qu’est la Torah, ce qu’est être Juif et de s’engager sur le chemin du Retour auprès d’un Rav ou d’une autorité Rabbinique reconnus. Ils apprendront en quoi consiste vivre le Shabbath, manger Kasher, respecter toutes les autres lois de la Torah. Ils viendront alors renforcer le camp d’Israël pour qu’il soit, entre autres, jugé favorablement et non l’inverse.

N’oublions pas le : « Nous ferons et nous comprendrons ». Ce n’est qu’en faisant, qu’en mettant les Tefillines par exemple, que l’on peut comprendre tout le bien que cela procure, mis à part le fait d’avoir réalisé ce qui nous est prescrit en tant qu’homme. Il en est de même pour tous les domaines de la vie. Par contre si nous n’accomplissons pas les préceptes, nous n’avons pas accès à leur compréhension ; notre cœur se bouche, devient hermétique, n’a plus les voies et les outils pour comprendre le sens profond de ce qui nous est demandé, au point d’en être rebuté et de le rejeter.

Voilà d’où vient le fossé et ce qui peut prendre la forme d’un rejet -anachronique et totalement injustifié- envers le monde de la Torah.

Qu’il nous soit donné à tous d’être à la hauteur d’assumer pleinement nos responsabilités. Nous seront alors bien plus forts et Hashem sera plus franchement avec nous pour nous faire jouir de Sa félicité. Nous en avons besoin de toute urgence en cette période extrêmement critique où il nous incombe d’accomplir une autre Mitzva de la Torah : « OU SHMARTÈM MEOD LENAFSHOTÉKHÈM » – de veiller à tout faire pour que nous protégions notre vie et que nous soyons tous en bonne santé ! Avec nos meilleures pensées.