Le “Mot du Jour”  17 Adar 2  5782 – 20 mars 2022 

LES ÉPREUVES ET LA JOIE EN PARTAGE (juste après POURIM 5782)

Qui n’est pas interpellé par la situation en Ukraine ? Ceux qui voient, comprennent, et ressentent les souffrances des populations qui sont contraintes d’abandonner tous leurs biens et une part importante de leur histoire derrière elles de façon extrêmement brutale pour rester en vie, sont forcément ébranlés. Le lien que nous avons, avec tous nos frères juifs qui tentent de sortir de cet enfer pour se mettre à l’abri en gagnant la Pologne, la Moldavie, la Slovaquie et, de là, pour certains, Israël, nous interpelle au plus profond. Et malgré cela nous avons l’obligation de nous réjouir sans réserve à Pourim. Comment pouvons-nous concilier des sentiments opposés et nous réjouir sachant les épreuves vécues par ces juifs qui lutent pour rester vivants ?

C’est effectivement un dilemme. D’autant qu’il nous incombe de nous soucier d’autrui, en référence à la Mitzva, l’ordre, d’aimer son prochain comme soi-même. Dès lors, s’il souffre, je souffre aussi. Dans tous les cas je dois tout faire pour partager sa peine et le soulager.

Durant la 1ère guerre mondiale, alors que des communautés juives fuyaient les combats en Europe de l’Est, n’emportant avec elles que ce qu’elles pouvaient, un groupe trouva refuge dans la synagogue de Brisk en Lituanie. Des paillasses avaient été apportés pour leur procurer un minimum de bien-être. Une nuit, on chercha partout le Rav. On finit par le trouver endormi par terre dans la Shoule, parmi les réfugiés. On lui demanda ce qu’il faisait là. Le Brisk Rov répondit qu’il ne pouvait pas rester dans son lit sachant que ses frères manquaient de tout. Son exemple n’est pas unique et bien des membres de notre Peuple ont agit ainsi et perpétuent, de nos jours, ces mêmes soucis envers les populations déplacées fuyant les combats en Ukraine. Il suffit de voir tous les représentants de ‘Habad s’affairer à soulager les populations en détresse et cela, à leurs risques et périls. Et à nouveau, ils ne sont pas les seuls à agir dans ce sens. Mais des moyens plus sérieux devraient être réunis pour encore mieux protéger et abriter. Que l’on n’en vienne pas à nous reprocher de n’avoir pas fait assez, comme cela fut le cas envers les Juifs d’Amérique, après la seconde guerre mondiale, qui auraient dû intervenir pour que cessent les atrocités des camps de concentration en Europe, alors qu’ils savaient ce qui s’y passait.

Et pourtant… À Pourim, la Meguila nous conte l’issue totalement miraculeuse qui vit se renverser de tout en tout les projets funestes de Amane -le pervers et perfide- au profit du Peuple Juif. De sorte que, depuis lors, les 14 et 15 Adar sont des jours de grande allégresse. Or la joie repousse les épreuves et les malheurs. Elle les transcende et les transforme en temps de libération, de soulagement, de réconfort et entraîne de nouvelles grandes joies. Les terribles décrets sont annulés et les horizons s’illuminent. La joie amène la paix et la sérénité. Au point où les ‘Hassidim de Breslev proclament : « Mitzva Guedola Liiyoth BeSim’ha Tamid » C’est une grand Mitzva d’être toujours dans la joie ». De sorte qu’en réalisant cette Mitzva, et qui dit Mitzva, c’est-à-dire un ordre de la Torah, je me rattache à l’éternité, ce qui est éternel, pérenne à tout jamais. Je me rattache au Créateur du Monde. Il me garantit qu’en étant joyeux et heureux de tout ce qu’Il me donne, je le loue et le remercie constamment. Car tout ce qu’Il me donne est uniquement pour mon bien. Tout ce qu’Il donne est uniquement BIEN ! Même si je n’en n’est pas conscience alors.

Aujourd’hui, on nous rassure par mail en nous adressant ceci :

« Des milliers de Juifs ont participé pendant la journée à la lecture de la Meguila et aux fêtes de Pourim dans les grandes villes d’Ukraine… …Les émissaires ‘Habad, avec l’aide de la Fédération et du Centre rabbinique européen, ont distribué quelque 50 000 colis aux Juifs dans toute l’Ukraine…  … Le rav Moshe Reuven Asman, le rabbin de Kiev et émissaire Habad auprès de l’État, a déclaré : « Ce matin, il y avait beaucoup de gens qui ont couru sous le feu… et nous leur avons lu la Meguila, les avons invités à manger et les avons rendus heureux ». Et il a poursuivi : « Les gens sont venus effrayés. Vous entendez leurs histoires, lorsqu’ils étaient entre la vie et la mort. Quand vous les rendez heureux et qu’ils rient et se réjouissent, il n’y a pas de plus grande joie que celle-ci ».

Cela nous rassure-t-il vraiment ? Ne faut-il pas être circonspect et s’interroger ? L’ère de la communication où tant de fausses nouvelles circulent aiguise notre prudence. Peut-être ne devrions-nous pas être rassurés et tranquilles ? Où en est notre propre discernement ? 50.000 colis distribués en une journée pour Pourim, c’est énorme et fantastique ! Mais et les autres jours, envers une population affamée à la portée de bombardements, c’est un autre challenge. Comment puis-je prendre part  pour les soulager et les protéger ? Et puis, nous devrions peut-être aussi nous interroger sur notre propre sort ? Sommes-nous en sécurité et que devrions-nous faire ?

Nous vivons des bouleversements multiples, dont le dernier en date est le départ de ce monde de cet immense bouclier et guide spirituel pour des générations et des millions de Juifs qu’était le Rav ‘Haïm KANIEWSKI zékhèr Tsadik VeKadosh Livrakha, de mémoire bénie. « Mitath Tsadik Mekhapéreth Al Hador » La mort d’un Tsadik répare et fait pardonner les fautes de la génération. Le Gadol Hador, l’homme le plus Grand de la génération a été enterré ce jour, accompagné jusqu’à sa dernière demeure par des centaines de milliers de Juifs. Ce sont des signes annonciateurs, palpables, de la venue prochaine de Mashia’h, du Messie, que nous appelons de tous nos vœux pour très bientôt et de nos jours. Amen !

Mais sommes-nous réellement prêts à accueillir Mashia’h ? Le voulons-nous seulement ? Ne prenons pas le risque d’être comme les 4/5ème du Peuple qui sont morts et  enterrés durant la 9ème plaie d’Égypte parce qu’ils ne voulaient pas en sortir. Au contraire, soyons comme le 1/5ème du Peuple qui a pu être libéré et sauvé. Faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour en faire partie, en le voulant intensément et en priant HASHEM de tout notre cœur de nous y aider et d’être exaucés.

Dédié LeIllouye Nishmath, pour l’élévation de l’âme de Shim’one bar Louisa et Abraham AKOUN zal.