LE RABBI DE KALOV – 134 Pourim – 5785

Obtenir la paix en s’écartant de la recherche des honneurs

Il existe un récit sur un ‘Hassid qui marchait un jour avec le prophète Eliyahou et ils tombèrent sur la carcasse d’un animal en chemin. Cette charogne dégageait une terrible odeur nauséabonde, au point que le ‘Hassid se boucha le nez. En revanche, Eliyahou Hanavi était proche de la charogne, mais ne sentit rien. 

Par la suite, ils aperçurent de loin un homme avancer dans leur direction, et celui-ci marchait avec fierté et suffisance, et aussitôt, Eliyahou Hanavi mit sa main sur le nez pour le boucher. Le ‘Hassid l’interrogea : « Pourquoi, en apercevant la charogne, vous n’avez pas mis la main sur le nez, tandis qu’ici, vous vous êtes bouché le nez ?»

Le prophète Eliyahou lui répondit : « C’est plus dégoûtant que la charogne : en effet, lorsqu’un homme touche une charogne, il est Tamé (impur) uniquement jusqu’au soir, mais celui qui s’approche d’un homme tel que celui-là est affecté d’une très grave impureté. »

Ce récit est mentionné par Rabbi Tsvi Hirsch Koidinover dans son ouvrage Kav Hayachar au nom des anciens. Il explique comment l’orgueil induit une très grande impureté, du fait qu’elle multiplie les querelles, la jalousie, la haine, la médisance, la colère, le mensonge et le sarcasme. En conséquence, le prophète Eliyahou nous met en garde : évitez à tout prix de vous lier à un homme orgueilleux, car vous risquez de vous imprégner de son attitude répréhensible. 

Nous découvrons dans la Paracha de Metsora qu’un homme qui se vante, qui profère de la médisance et déclenche une controverse, est touché par la Tsaraat (lèpre) et devient impur. Il est ensuite tenu de s’éloigner des autres, afin qu’ils ne suivent pas son exemple et déclenchent des querelles, comme l’indiquent nos Sages (Erkhin 16b) : comme il a séparé un homme de son prochain, de ce fait, la Torah lui demande de s’isoler. C’est uniquement lorsque sa fierté est brisée suite à l’isolation, à la maladie et au repentir que la blessure disparaît et qu’il peut retourner dans le camp. 

À ce sujet, le Rav et auteur du Ohev Israël d’Apte relate qu’un jour, il se rendit dans une localité, et on lui proposa deux hébergements différents. Il choisit de résider chez un homme très simple et repoussa l’offre d’un homme intelligent et respectable. Devant la stupéfaction de ses proches sur son choix, le Rabbi leur répondit : « Il est dit à propos des fauteurs : « Qui réside avec eux au milieu de leurs impuretés »(Vayikra 16,16) et s’il est agréable pour Hachem de résider parmi eux, c’est certainement le cas aussi pour moi. Mais sur les orgueilleux, Hachem dit : « Eux et Moi ne pouvons résider ensemble  » (Sotah 5), or je m’attache aux vertus de Hachem et ne suis pas capable de supporter la fréquentation d’un orgueilleux. »

Nous constatons ce phénomène chez les Tsadikim et les ‘Hassidim à toutes les époques, qui ont toujours méprisé la poursuite des honneurs, au point d’être dégoûté en voyant un homme qui poursuit les honneurs. À ce sujet, on raconte qu’un jour, entrèrent chez le Gaon, auteur du Torat ‘Hessed de Lublin, des hommes orgueilleux venus lui rendre visite, et il fut tellement dégoûté de leur attitude hautaine qu’il fut contraint d’entrer dans la cuisine pour vomir. 

Si on observe les présidents et ministres des nations du monde, on constate qu’ils sont très orgueilleux et dotés d’autres vices. Certains le montrent ouvertement, tandis que d’autres tentent de le dissimuler. Ce n’est point le cas des Maîtres juifs qui étudient la Torah, qui se conduisent humblement, pardonnent si on les offense et acquièrent toutes les vertus. Nos Maîtres affirment (Brakhot 9b) qu’il y a un intérêt pour l’homme à voir une fois dans sa vie de grands dirigeants des nations du monde, pour pouvoir faire la distinction entre des maîtres juifs et ceux des nations du monde. 

Il faut dans ce domaine une aide divine particulière pour ne pas accepter comme une évidence l’orgueil présent chez les nations du monde parmi lesquelles nous résidons en exil. Comme l’exprimait Rabbi Yéhiel de Zlatchov : c’est à ce sujet que D.ieu dit aux Bné Israël (Chémot 6,6) : « Je veux vous soustraire aux fardeaux (Savlot) de l’Égypte» : le terme Savlot ressemble au terme Savlanout (patience) : celle-ci les aidera à se soustraire de l’habitude de supporter la conduite des Égyptiens. 

On peut affirmer qu’à cet égard, les Bné Israël ont échoué à l’époque d’A’hachvéroch. Le roi A’hachvéroch poursuivait les honneurs, c’est pourquoi il gaspilla d’immenses sommes issues du trésor royal pour organiser, en présence d’un grand public, un immense festin opulent pour tous les peuples qui y participèrent et perdirent leur temps pendant six mois, et tout ceci, dans le but de consolider son pouvoir. De ce fait, lorsque son épouse Vachti refusa de venir se présenter devant tous, afin de lui faire honneur, il se mit dans une colère noire face à son refus de l’honorer, au point qu’il la mit à mort. 

À cette époque, les Juifs auraient dû critiquer dans leur foyer la recherche des honneurs du roi A’hachvéroch pour éviter qu’ils ne l’imitent. Mais ils s’en abstinrent, s’habituèrent à cette conduite, s’en inspirèrent et profitèrent du festin d’A’hachvéroch sans être perturbés par le faste et la poursuite des honneurs. 

C’est à ce sujet que nos Sages (Méguila 12a) affirment : « Pour quelle raison méritaient-ils la destruction ? Car ils avaient profité du festin de ce mécréant » : le décret avait été prononcé, car ils avaient profité de ce festin, ayant appris d’A’hachvéroch la fierté et la poursuite des honneurs, et ainsi, la paix et l’unité, qui protègent de tout mal, avaient été abolies.

Nous découvrons que Haman avait accusé le peuple juif d’être un « peuple disséminé, répandu parmi les nations.» Pour réparer ce point, Esther demanda à Mordékhaï : « Rassemble tous les Juifs » pour créer la paix et l’unité entre eux. En effet, Mordékhaï enseigna aux enfants d’Israël à s’écarter de la conduite d’A’hachvéroch et ils méritèrent le miracle de Pourim.

Il est rapporté dans l’ouvrage Toldot Yaakov Yossef que cela fait référence aux propos de nos Sages (Méguila 13a) : on l’avait nommé Mordékhaï Hayéhoudi, du fait que toute personne qui renie l’Avoda Zara (culte des idoles) est qualifiée de Yéhoudi. Mordékhaï avait aboli l’orgueil chez les enfants d’Israël, élément de l’Avoda Zara.

Nous découvrons cette idée à la fin de la Méguilat Esther, où Mordékhaï était «second (Michné) du roi A’hachvéroch » : il modifiait (Méchané) la conduite d’A’hachvéroch pour se conduire à l’opposé, en « recherchant le bien de son peuple. » Il leur enseigna à chercher les points positifs présents chez chaque Juif, à l’inverse du fauteur qui recherche les défauts chez les autres pour renforcer sa position de supériorité. Ainsi : « Il défendait la cause de tout son peuple» : de cette façon, il enseigna à toutes les générations à vivre en paix, dans l’unité et avec humilité.

Joyeux Pourim et Chabbath Chalom !