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Parasha – 232 – Vayétsé – 5786

בס »ד
La Paracha Vayétsé nous décrit la suite de la vie de Yaacov Avinou, son séjour de 20 ans chez son oncle Lavan, le frère de sa mère Rivka Iménou, qui deviendra son beau-père du fait de son mariage avec ses deux filles, Léa et Ra’hel.
Comme nous le voyons tout au long des Divré Torah, la Torah ne nous relate pas des péripéties historiques accidentelles. Toutes les situations auxquelles ont été confrontés nos Avot, puis le Clal Israël entier au long des siècles et des millénaires, sont les éléments de la construction du Monde.
Lorsque la Torah nous décrit ces faits, le but est de nous préparer à nos propres épreuves, individuellement et collectivement, pour que nous assumions notre place dans cette chaine de l’Histoire de la Création. Chaque instant de l’existence de chacun de nous est un maillon dans cette chaine.
Rav Pinkus rapporte (Tiférèt Chimchon, p.318) les paroles de Rav Aharon Kotler (Fondateur de la Yechiva de Lakewood aux Etats Unis) relativement au séjour de Yaacov Avinou chez Lavan.
Rav Kotler souligne l’aspect étonnant du verset qui commente les sept années d’attente de Yaacov en vue d’épouser Ra’hel : « Et ils furent (les sept ans) à ses yeux comme quelques jours dans son amour pour elle ! » (Beréchit 29, 20).
Or de façon naturelle, lorsque nous sommes dans l’attente d’un évènement important, même un petit délai nous semble « une montagne » …
Mais Rav Kotler explique que ce délai (décidé par Yaacov Avinou lui-même ; 29, 18) constituait la période de préparation nécessaire en vue de fonder le Peuple d’Israël ! Et il avait évalué qu’il lui était nécessaire de se parfaire pendant sept ans pour cela. Ce délai étant l’outil de son projet n’était pas vécu comme un obstacle mais comme une étape.
Ainsi le séjour de Yaacov chez Lavan est un élément constitutif de l’épanouissement de Yaacov Avinou et de la fondation des Chevatim (Pères des Tribus) qui naquirent et grandirent chez leur grand-père Lavan.
Rabbi Yerou’ham Levovitz (Daat ‘Hokhma OuMoussar, I, p. 65-90) développe le lien entre la réalité « naturelle » et la Torah. Hachem a investi dans la Création tous les éléments fondamentaux de la Torah, de telle sorte que le respect de la Création de Hachem mène à l’épanouissement de la Torah en l’homme, comme Avraham Avinou qui a « appris » la Torah « de lui-même ». Les Midot (« Traits » de personnalité) de l’Homme de par sa création doivent être autant d’outils pour se rapprocher de Hachem. Rabbi Yerou’ham souligne que le cachet du Peuple d’Israël réside dans les « Bonnes Midot » (p.80), par contraste avec les différents degrés de « Mauvaises Midot » pour lesquelles divers peuples ont été définitivement exclus de l’intégration dans le Clal Israël comme Amon et Moav, ou temporairement (deux générations à partir de la Guérout-conversion, comme Edom et Mitsraïm …
Amalek a atteint un degré de dévoiement justifiant le rejet total du monde.
Rabbi Yerou’ham souligne encore (p.82) que la Torah n’écarte pas les nations de l’assemblée de Hachem pour des fautes comme elle le fait pour des défauts de Midot.
Les Avot (Patriarches) ont affiné les Midot qu’ils ont transmises à leurs descendants.
Avraham Avinou a développé la Mida de ‘Hessed (le « Don gratuit) par laquelle il a perçu la Présence de Hachem dans la Création. Its’hak a épanoui la Mida de Guevoura (la « Retenue ») par laquelle l’Homme doit « contrôler » ses élans pour les garder conformes à la Volonté de son Créateur.
Yaacov Avinou a réalisé la complémentarité de ces deux Midot dans l’équilibre défini comme Emet (« Vérité »). Le Emet de Yaacov n’est évidemment pas la vérité formelle du commun des mortels, qui se limite aux apparences. Le véritable Emet est la conformité à la Volonté de Hachem en toutes choses.
Rabbi Yerou’ham explique (p.74) que l’éclat de la lumière ne peut jaillir que de l’opposition aux ténèbres : le Midrach dit (Bamidbar Rabah 19, 1) que seulement de la Touma (impureté) peut se produire la Tahara (Pureté), comme le Olam Haba (Monde à venir) du Olam Hazé (ce Monde).
C’est ainsi que ce n’est que de la confrontation à Essav puis à Lavan que s’est affinée la démarche de Yaacov, jusqu’à atteindre l’apogée : « Yaacov arriva « intègre » à la ville de Chekhèm … » (33, 18) que Rachi commente ainsi : « intègre dans son corps … intègre dans son argent … intègre dans sa Torah (il n’a pas oublié son étude dans la maison de Lavan) … »
Ainsi la confrontation à Lavan a été décisive dans l’évolution de Yaacov et des Chevatim. Voyons alors qui est Lavan ?!
Rav Chalom Schwadron trace le portrait de Lavan selon les indications de nos ‘Hakhamim (Lev Chalom, p. 251-259). La Torah définit la confrontation de Yaacov et Lavan : « Le Arami (l’araméen-Lavan) a (voulu) anéanti(r) mon père (Yaacov), et il (Yaacov) est descendu en Egypte … » (Devarim 26, 5).
Le Midrach (Beréchit Rabah 70, 19) explique que Lavan est appelé « Ramaï » (anagramme de « Arami »- Trompeur) car il a abusé de ses concitoyens. Dans sa volonté de retenir Yaacov qui avait amené la fécondité qui remplaçait la sècheresse antérieure, il décida de substituer, avec la complicité de ses concitoyens, Léa à Ra’hel pour laquelle Yaacov avait travaillé sept ans. Ainsi Yaacov serait amené à prolonger son séjour à l’avantage de tous. Considérant que c’était dans l’intérêt du bien public, Lavan s’empara par un stratagème de gages de chacun, qu’il utilisa pour financer le festin du mariage de Léa, qu’il donna à Yaacov à la place de Ra’hel.
Il serait trop long ici de détailler toutes les manigances de Lavan. L’essentiel de l’enseignement de Rav Schwadron consiste à souligner que Lavan était à ce point corrompu dans son dévoiement de la réalité qu’il se trompait lui-même plus encore que les autres, et était profondément pétri de la justesse de ses calculs et convaincu de sa propre intégrité. Tous ses désirs profonds étaient instantanément transformés en « grands principes moraux », qu’il inventait selon ses besoins, et qu’il prônait ensuite énergiquement.
Face à une telle sorte de « Trompeur », Yaacov n’avait aucune chance de triompher comme il le pensait et l’avait affirmé à Ra’hel lors de leur rencontre initiale (Rachi 29, 12). Tout ce qu’il restait à Yaacov était de se protéger contre l’influence de Lavan, comme nous voyons dans sa proclamation au retour de chez Lavan (Rachi 32, 5).
Pour atteindre son but de rester imperméable aux Midot de Lavan, Yaacov Avinou avait effectué un séjour de 14 ans pour étudier la Torah dans la Yechiva de Ever, son ancêtre (Rachi 28, 9).
Rav Chalom Chapira (HaMaor ChèbaTorah, p. 235) souligne que Yaacov projetait initialement d’épouser directement Ra’hel, pour laquelle il définit une période de travail chez Lavan de 7 ans.
Il ressort que selon son calcul, Yaacov avait besoin d’une préparation double de 14 ans d’étude de la Torah pour préparer l’épreuve de 7 ans dans l’environnement de Lavan …
Rav Chapira conclut que sans cette préparation de 14 ans, il aurait été impossible pour Yaacov de former les 12 Chevatim dans la maison de Lavan !
Rav Reouven Karèlnestein (Ye’hi Reouven, p.399) note que Yaacov Avinou vécut 20 ans avec Lavan, (son oncle, employeur et beau-père …) et conserva son essence d’Emet, comme le verset témoigne : « Tu as attribué le Emet à Yaacov, le ‘Hessed à Avraham … » (Mikha 7, 20).
Hachem a dévolu l’épanouissement de ces Midot aux Avot, et nous constatons dans cette Paracha que l’affinage du Emet de Yaacov passait par l’épreuve de la confrontation permanente à Lavan – le trompeur.
Rav Chraga Grossbard (Daat Chraga, p. 232) explique que les épreuves de Yaacov relatives à la Mida de Emet étaient destinées à affiner le Emet pour qu’il ne soit pas chez Yaacov l’expression d’une tendance naturelle personnelle, mais exclusivement l’adéquation parfaite à la Volonté de Hachem, instant par instant, même au prix de la renonciation à ses propres sentiments naturels de droiture, comme lorsqu’il dut aller recevoir la Berakha à la place d’Essav sur l’ordre (issu d’une Nevoua – prophétie) de sa mère Rivka.
Ce n’est qu’au prix de ces efforts qui dépassent notre imagination que Yaacov a pu revenir de chez Lavan « intact » comme nous l’avons vu plus haut de Rachi …
Mais comment comprendre la naissance et la croissance des Chevatim (Fils de Yaacov, ancêtres des 12 Tribus) « à l’ombre » d’un tel grand-père ?!
Rav David Powarski (Moussar VaDaat, I, 5) développe cette analyse. Il explique qu’effectivement le lien qui attachait Lavan à ses petits-fils, et réciproquement, était source d’un Nissayon (épreuve) considérable pour les fils de Yaacov. Le Midrach dit (74, 8) que lorsque Lavan accusa Yaacov d’avoir volé « ses dieux » (31, 30), ses petits-fils lui dirent : « Nous avons honte de toi, père de notre mère, de ce que tu dis dans ta vieillesse « pourquoi as-tu volé « mes dieux » ?! Il ressort que les Chevatim étaient attachés à leur grand-père, et ne s’attendaient pas de sa part à une telle stupidité (malgré ses pratiques qui devaient être partiellement perceptibles …).
Nous voyons ici que Lavan n’était pas « déréférencé » aux yeux de ses petits-fils. L’épreuve de la fidélité entre leur père et leur grand-père était donc considérable …
De là nous comprenons la grandeur des Chevatim qui, dès leur jeune âge, confrontés au même Nissayon (épreuve) que leur père Yaacov, ont décelé la tromperie profonde de leur grand-père, un personnage imprégné de mensonge jusqu’aux tréfonds de sa propre personnalité.
Rabbi Yerou’ham étend l’analyse aux défauts apparaissant chez les Juifs eux-mêmes dans les différents lieux de la Galout (exil). Il explique que l’essence du Clal Israël est les Bonnes Midot qui sont l’héritage des Avot. Mais comme le dit le verset de Chir HaChirim : « Ne me considérez pas alors que je suis noire, car le soleil m’a brunie ! » (1, 6), c’est-à-dire que l’empreinte des diverses mauvaises Midot des peuples auxquels ils s’assimilent s’attache à eux.
L’enseignement de cette Paracha relatif à Yaacov doit être notre guide dans la vie au contact des nations émules de Lavan. Face à l’influence de l’environnement extérieur qui vise à nous polluer, seule l’empreinte profonde de la Torah acquise à la Yechiva peut nous protéger efficacement !

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