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Parasha – 231 – Toldot – 5786

בס »ד
La Paracha Toldot ainsi que la Paracha Vayichla’h accordent une place considérable au personnage de Essav, le fils de Its’hak et Rivka et frère de Yaacov Avinou.
Essav y est dépeint de façon particulièrement défavorable, avec même une pointe de dérision comme dans le verset (Beréchit 25, 30) où il demande à Yaacov : « Gave moi de ce rouge, rouge, car je suis las ! ».
La Torah accentue le contraste entre les deux frères, soulignant la préférence apparente d’Its’hak Avinou pour Essav, en opposition aux sentiments de Rivka centrée sur Yaacov (25, 28). La Torah souligne le motif de la « préférence apparente » d’Its’hak pour Essav : « Car la chasse était dans sa bouche », que Rachi explique de deux manières : 1. Essav apportait à Its’hak le produit de sa chasse. 2.Essav trompait par sa bouche Its’hak sur son comportement.
Le portrait caricatural passe ici d’Essav à Its’hak qu’on se représente alors comme un vieillard crédule qu’un voyou réussit facilement à gruger …
Mais une telle lecture de la Torah est-elle crédible, et même digne ?!
Pouvons-nous réellement considérer que Hachem nous décrit dans Sa Torah des personnages aussi dérisoires ?!
N’avons-nous pas le devoir de comprendre que la Torah ne se consacre pas à des futilités, et ne nous présente pas des personnages insignifiants ?!
Comment pouvons-nous imaginer que dans la maison d’Its’hak et Rivka, les fondements de notre lien à Hachem, ait pu évoluer un tel « voyou de bas étage » ?!
Et comment voir en Its’hak Avinou, le second pilier de la Avoda (le Service de Hachem), doté du Roua’h HaKodech l’Inspiration Divine), un « Rabbin » – père indulgent jusqu’au ridicule d’un simple délinquant méprisable ?!
Ce n’est que parce que les générations récentes ont abondé en « religieux » médiocres que nous nous représentons nos Pères à « l’image » de notre monde !
Corrigeons pour commencer le portrait caricatural de Its’hak Avinou :
Rav Guedalya Schorr (Or Guedalyahou p. 83) réfute la compréhension que Its’hak aurait été abusé par des mensonges d’Essav. Il cite le Ari Zal qui dit que : « la chasse était dans sa bouche » signifie que les « éclats de Kedoucha » qui résidaient dans Essav étaient « dans sa bouche ». Il portait d’abondantes potentialités de Kedoucha (« révélation » de la Présence de Hachem dans la Création).
Its’hak percevait qu’Essav était destiné à exprimer sa Avoda (Service de Hachem) dans la dimension de « Guevoura », en surmontant le « Mal » qui était en lui. En cela, la Avoda d’Essav se situait dans la continuité de celle d’Its’hak Avinou lui-même.
Rav Dessler également cite le Ari Zal qui souligne que c’est une erreur de croire qu’Essav était hypocrite et trompait son père. Une telle chose était totalement impossible ! (Mikhtav MeEliahou I, p.234)
Les « éclats » de Kedoucha (c’est-à-dire les éveils réels vers la Kedoucha) restaient « dans sa bouche », c’est-à-dire n’étaient pas absorbés profondément en lui. Son intérêt pour la Avoda restait superficiel chez lui.
Rav Dessler développe la notion de la Avoda différenciée des Avot (Patriarches), et des « Midot » (caractéristiques) qu’elle revêtait (Mikhtav MeEliahou, II, p.204). Il souligne qu’il n’est pas question de croire que les Avot étaient « habités » chacun par un trait de caractère dominant qui orientait leur Avoda.
Ils possédaient la maîtrise absolue sur leurs « Midot » (tendances naturelles), et chacun a choisi librement le domaine dans lequel orienter sa Avoda. Its’hak a dirigé ses efforts dans le sens de la « Guevoura » (la « Maitrise ») pour « compléter » la Avoda initiale d’Avraham Avinou, centrée sur le ‘Hessed (le « Don Gratuit »), « Mida » que Hachem nous manifeste dans la Création, comme nous l’avons vu dans d’autres Divré Torah. (Voir Pa’had Its’hak de Rav Hutner, Roch Hachana, I).
Rav Dessler précise qu’Essav n’était évidemment pas né pour être Racha (Impie). Par sa Be’hira (Libre-arbitre) il avait la possibilité de surmonter tous les élans négatifs qui s’éveillaient en lui.
Rav David Powarski explique que la différence entre Essav et Yaacov se situait dans le refus d’Essav de faire un effort pour progresser. Essav voulait que tout vienne facilement (Yichmerou Daat, p. 59).
Rav Powarski développe encore (Moussar VaDaat, I, 4) qu’Essav était certainement imprégné de l’atmosphère de la maison d’Its’hak et Rivka. Seulement il s’était tourné vers l’extérieur : « Un homme des champs » (25, 27), et s’était rapproché de la mentalité de ceux qui sont « en dehors de la Tente », dans les concepts extérieurs à la « Tente de la Torah », à l’opposé de Yaacov qui était « un homme intègre, résidant dans les Tentes » (25, 27), (les Tentes de Chem-fils de Noa’h, et Ever-son petit-fils) pour se concentrer dans l’approche de la Torah. Essav, par contre, ne restait pas constamment dans l’empreinte de « la Maison ».
Rav ‘Haïm Friedlander (Sifté ‘Haïm p. 274 et suivantes) analyse la différence entre Yaacov et Essav. Il explique que, comme l’exprime le verset (25, 25), Essav était « accompli » dès la naissance, physiquement jusqu’aux cheveux (Rachi). C’est le caractère qu’il amplifia tout au long de sa vie, d’être « complet » comme il était, dans un refus d’apprendre et de progresser. Il se contentait d’adopter des « perfectionnements » dans certains domaines, et couvrait ses défauts profonds par sa « Tsidkout » (intégrité) superficielle.
Rav Friedlander souligne qu’Essav se trompait lui-même (ce qui est plus facile …) plus que les autres (ce qui est plus difficile …). Comme le dit Rav Friedlander au nom de son Rav, Rav Dessler, Essav se limitait à une démarche superficielle.
Rav Chraga Grossbard (Tiférèt Chraga p. 201) insiste pareillement sur le fait que la démarche d’Essav n’était pas mensongère, mais superficielle. Ainsi il ne mentait pas, ce qui explique qu’il réussissait à induire Its’hak Avinou en erreur.
Ces brèves explications nous permettent de comprendre la faveur d’Its’hak envers Essav. Il y avait, certes, erreur de la part d’Its’hak ; mais pas comme on le comprend généralement à un niveau grotesque incompatible avec la grandeur d’un de nos Avot (Patriarches).
L’erreur d’Its’hak, entretenue jusqu’au moment des Berakhot (27, 18-34) par l’absence « d’information » par Hachem sur les manques profonds d’Essav, se situait à un niveau inaccessible à « l’œil humain » si aiguisé soit-il !
Ce n’est qu’après que Yaacov Avinou ait reçu les Berakhot, qu’Its’hak considérait appropriées à Essav plutôt qu’à Yaacov, que Hachem « ouvrit » les yeux d’Its’hak comme l’explique Rachi (sur le verset 27, 33) : « Il vit le Guehinom ouvert sous lui ».
Rav Guedalya Schorr (Or Guedalyahou, p. 82) explique que Yaacov et Essav étaient initialement destinés à poursuivre la Avoda des Avot (Patriarches) qui consistait à « réparer » la faute d’Adam Harichone.
Essav devait réparer « l’amalgame du Bien et du Mal » issu de la faute, et Yaacov devait « amplifier » le bien dans la Création. Chacun aurait donné naissance à six Chevatim (Tribus). Essav ayant failli à sa mission, cette responsabilité retomba sur les épaules de Yaacov qui dut assumer les deux fonctions, prenant ainsi « l’identité » d’Essav : « Je suis Essav ton aîné » (27, 19).
Rav Moché Epstein (Beér Moché, p. 554) cite un Midrach (Chir HaChirim Zouta, I) : « Et les jeunes « grandirent » voici Yaacov et Essav (25, 27). De même que le Nom (de Hachem) s’applique sur Yaacov, ainsi il était destiné à s’appliquer sur Essav. Essav était apte à produire des Rois (d’Israël), et Yaacov était apte à produire des Cohanim.
Les premières Berakhot (27, 28-29) étaient destinées à Essav, et les dernières (28, 3-4) à Yaacov … ».
De par sa racine Essav était apte à la grandeur mais il s’est laissé entrainer à la suite du Mal. C’est alors que Hachem l’a rejeté (Mal’akhi 1, 3).
Ces quelques éléments nous ouvrent un regard nouveau sur les « péripéties » de ces Parachiot que nous sommes malheureusement habitués à lire avec le langage de l’enfance, avec des images caricaturales qui rendent la Torah « dérisoire » à nos yeux.
En considérant l’étude de la Torah d’un regard mûr et adulte, nous ne pouvons qu’éprouver une inquiétude justifiée sur notre propre situation. Il ne s’agit bien sûr pas de cultiver des complexes paralysants. Scrutons attentivement nos actes pour éliminer jusqu’à la moindre trace des manques que la Torah nous décrit chez des « Grands Hommes » comme Essav.
Puisons dans chaque verset les outils pour nous rapprocher de l’exemple de nos Avot qui nous ont transmis l’Alliance avec Hachem.

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