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Parasha – 220 – Ki Tavo – 5785

בס »ד
La Mitsva des Bicourim (Prémices) (Devarim 26, 1-11) est la 1ère Mitsva de la Paracha Ki Tavo. Le propriétaire amène au Cohen les premiers fruits mûrs des espèces de sa propriété qui caractérisent Erets Israël, et il proclame ainsi (Rachi, verset 3) qu’il n’est pas « ingrat ».
Le verset suivant dit que chaque Juif reprend à cette occasion les péripéties de « son » histoire, celle de son Peuple, depuis notre ancêtre Yaacov qui a dû descendre en Egypte pour échapper au risque d’élimination spirituelle qu’il courait avec sa descendance en habitant chez son oncle et beau-père Lavan. A travers les souffrances de la Galout (Exil) en Egypte, et les Nissim (Miracles) de la Sortie, on arrive (verset 9) au Don d’Erets Israël pour lequel nous apportons les Bicourim de notre terre afin de louer Hachem.
Cette Mitsva marque l’essence de notre relation à Hachem, faite entièrement de reconnaissance pour les cadeaux dont Hachem nous a gratifiés, et non d’attente des satisfactions à venir !
Les explications de Rav Chimchon Raphaël Hirsch sur la démarche des Bené Israël dans leur demande à Aharon de confectionner ce qui est devenu le Eguel (Veau d’or) (Chemot 32, 1) nous permettent de mieux percevoir l’impact de cette Mitsva.
Tout comme nombre de Commentateurs, et entre autres le Ramban, Rav Hirsch souligne que les Bené Israël ne cherchaient pas un « remplacement » à Hachem ! (‘Hass Ve Chalom – « à Dieu ne plaise » …). Ils dirent clairement : « Car celui-ci, l’homme, Moché, qui nous a fait monter du pays d’Egypte … ».
Leur faute résidait dans le fait de baser leur confiance dans leur avenir sur la présence de « l’image » de Moché. Cette croyance vaine que l’Homme peut et est autorisé à se confectionner une telle représentation, et en a même l’obligation, sont le résultat d’une conception radicalement opposée à la Emouna fondamentale d’Israël sur « l’essence » de Hachem et sur les relations réciproques entre Hachem et l’Homme !
La conception idolâtre consiste à croire que l’Homme peut se confectionner une « divinité », c’est-à-dire un élément quel qu’il soit qu’il érigera en valeur suprême, et que par cela cette chose deviendra le soutien de son sort.
Rav Hirsch continue et développe que toute démarche personnelle subjective de la part de l’Homme constitue une forme d’idolâtrie. Croire qu’il peut influer selon sa volonté sur les causes de son avenir revient à se placer en « vis-à vis » face à Hachem, et même comme « influenceur » sur la Volonté de Hachem.
C’est ce que le Navi (Prophète) Chemouel a dit au roi Chaoul lorsqu’il argumentait face à l’ordre de Hachem d’anéantir Amalek (Chemouel I, 15, 22-23) : « Voici ! écouter est préférable à une offrande … car c’est équivalent à la faute des idoles le fait d’insister ! » …
Face à ces erreurs se dresse la Emouna vraie d’Israël que l’Homme ne peut, et en vérité n’a aucun besoin ni droit de s’abandonner à une telle subjectivité. La conformité de sa démarche à la Volonté Divine est le seul chemin par lequel l’homme peut influer sur son sort …
Cette introduction nous mène à la suite de la Paracha où la Torah nous décrit l’alternative entre la réussite brillante d’Israël résultant du lien à Hachem (28, 1-14) et l’abime de la déchéance collective qui fait suite à l’abandon de ce lien (15-68). Cette alternative est conclue par le verset (28, 69) : « Ce sont les paroles de l’alliance que Hachem ordonna à Moché de conclure avec les Bené Israël dans le pays de Moav (au seuil de l’entrée en Erets Israël) … ».
Les catastrophes s’abattent sur Israël, comme la Galout (exil) actuelle, suite à la destruction du second Beth HaMikdach (Temple), comme le développe le Ramban (Vayikra 26, 16). Le Ramban explique que cette Galout résulte des fautes de l’époque du second Beth HaMikdach, différentes de celles qui ont mené à la destruction du premier Beth HaMikdach. Le premier Beth HaMikdach fut perdu en raison de fautes fondamentales, telles que l’idolâtrie. Par contre le second Beth HaMikdach fut détruit au motif d’un abandon partiel de la Torah comme en témoigne le verset (28, 15) « Ce sera si tu n’écoutes pas la Voix de Hachem ton Dieu, pour garder et accomplir toutes Ses Mitsvot et Ses Décrets … ».
Dans l’énoncé des malheurs qui s’abattent sur nous dans cette Galout les versets 36 et 64 disent à 2 reprises ; « Et tu serviras là-bas des dieux étrangers … ». Le but de la Galout étant de nous ramener vers Hachem, il est surprenant que la Galout elle-même nous entraine à des fautes plus graves ! Quel serait alors l’effet « curatif » de la Galout ?!
Le Targoum (Traduction explication de la Torah en Araméen) traduit par « Tu serviras là-bas des peuples qui servent des idoles … ». Nombre de commentateurs suivent cette explication qui montre qu’il ne s’agit pas littéralement de glisser à « l’idolâtrie », mais d’en être dépendants par notre allégeance à la culture des nations parmi lesquelles nous sommes exilés.
Rav Tsvi Hirsch Ferber (Kerem Hatsvi, p.130) interprète le verset comme se rapportant aux démarches d’assimilation à la société environnante. Il souligne la suite du verset (64-65) « Tu serviras … et parmi ces peuples tu ne trouveras pas le repos …« . Tous les efforts pour s’intégrer et être « productifs » pour la nation, prendre une part importante dans le monde de la connaissance, des sciences, de l’invention n’aboutiront qu’au mépris et au rejet, comme dans l’Allemagne d’avant la Choa que Rav Ferber a connue.
Rav Chimchon Pinkus cite un débat entre un des Grands ‘Hakhamim, Rabbi Yehochou’a Ben ‘Hanania et les Sages d’Athènes (Guemara Bekhorot, 8b). Au-delà des termes choisis par eux, la question fondamentale des Grecs était justement celle-ci : Comment sommes-nous appelés à sortir de la Galout, si cette Galout elle-même nous mène à de nouvelles fautes ?! Rav Pinkus rapporte la réponse de Rabbi Yehochou’a telle que la décrypte Rav ‘Haïm MiVolozin, qu’à la fin de la Galout il y aura des souffrances particulièrement dures qui amèneront l’aboutissement de la Gueoula.
Rav Dessler (Mikhtav MeEliahou IV, p. 132) analyse les effets de la Galout. Il soulève, lui aussi, la question de l’efficacité si la Galout elle-même entraine des fautes comme le mentionne les versets cités plus haut ?!
Il répond en rapportant les paroles de Rabbi Israël Salanter qui définit deux sortes distinctes de Yetser Hara (Penchant pour le Mal) : Le Yetser Hara « naturel », qui agit en fonction des tendances et des appétits de chacun, et le Yetser Hara « spirituel », qui est une force de Touma dans l’homme, qui n’est pas lié aux tendances ou aux appétits. Au contraire, ce Yetser Hara « spirituel » agit occasionnellement contre le tempérament de l’homme, comme lorsqu’il détourne quelqu’un, qui est naturellement assoiffé d’honneur, de briguer des honneurs liés à une Mitsva, ou incite celui qui n’a pas appétit à l’étude à s’y investir précisément à un endroit souillé où l’étude est interdite…
Rav Dessler explique que le Yetser Hara « spirituel » agit en pleine connaissance de la faute, justement pour braver l’interdit. Le Yetser Hara « naturel », par contre, suit l’inclination de l’homme. Ce Yetser Hara est certes très dur, mais il ne comporte pas une composante de « révolte » contre Hachem. Rav Dessler explique ainsi qu’à la différence des générations antérieures à la Galout, qui avaient un niveau spirituel élevé, et manifestaient en parallèle une forme de révolte, la Galout a amené à un niveau « inférieur », où seul le Yetser Hara « naturel » subsiste. Celui-ci est appelé à céder face aux tourments de la fin de la Galout …
Rabbi Yerou’ham Levovitz (Daat Torah, p. 45) cite Rabbi Avraham Ibn Ezra qui explique le verset (28, 37) : « Et tu seras un étonnement, un exemple et une moquerie … ». Ibn Ezra explique ainsi la proximité entre les deux versets : ta démarche d’assimilation ne te réussira pas, mais tu seras sujet de critique …
Rabbi Yerou’ham souligne que la Tokha’ha (Remontrance) de cette Paracha, avec chaque verset, ainsi que tout le résultat des Mitsvot et des fautes, sont parmi les prodiges les plus redoutables. Aucun peuple n’est comparable à Israël dans les drames de la Tokha’ha qui se sont déversés sur lui. Rabbi Yerou’ham (qui a vécu la période d’avant la Choa) marque l’aspect surprenant du fait que le moindre peuple, tel que les Lituaniens à son époque, peuple d’à peine un million d’hommes, composé de « garçons vachers » incultes, avait « son mot à dire » sur les Juifs… Cette effervescence mondiale est en elle-même incompréhensible si ce n’est par l’intervention Divine qu’elle manifeste !
Rav Yaacov Emden souligne pareillement dans l’introduction à son commentaire du Sidour (p.6) combien la pérennité de notre Peuple à travers tous les tourments de la Galout, alors que les plus grandes puissances de l’histoire ont disparu, est un bien plus grand prodige que tous les Nissim que Hachem a fait à la Sortie d’Egypte, dans le désert et en Erets Israël.
Notre époque, avec les vagues croissantes d’hostilité à notre égard, dans tous les pays du monde, même là où il n’y a pas ou presque le moindre Juif, dans toutes les couches de la société, à commencer par le monde des « idées » et de la culture, est une illustration flagrante de ces versets !
Les sursauts d’éveil qui se manifestent un peu partout dans le monde, et particulièrement en Erets Israël, dans la « Medina » qui prétendait résoudre le problème de l’antisémitisme et qui aujourd’hui l’exacerbe partout dans le monde, sont la plus puissante expression de l’objectif de la Galout et des erreurs qui peuvent s’y manifester.

